Inexorablement en voie de boboïsation et de gentrification avancée, le quartier de la Guillotière n'en reste pas moins une enclave intriguante, passionnante terre d'immigration depuis un siècle avec l'arrivée des Italiens, des juifs d'Europe de l'Est puis des Asiatiques et des Africains.
C'est à ce terrain mouvant que s'intéresse l'ethnographe et photographe Benjamin Vanderlick dans une exposition présentée au Musée africain, mais plus encore au cours des visites commentées du quartier que l'artiste-chercheur propose. Depuis 2011, il travaille sur cette «petite Afrique» de la Guill'. La zone géographique est étroite (de part et d'autre du cours Jean Jaurès et du cours Gambetta à Jean Macé pour ses frontières Nord-Sud) et les commerces incontournables pour la population issue de l'immigration africaine, que ce soit pour y faire ses emplettes, se faire couper/rallonger les cheveux, organiser un transfert d'argent (ces sociétés sont en vogue depuis que cette fonction n'est plus le monopole des banques de transferts) ou tout simplement y manger (une quinzaine de bars-restaurants sont installés, malgré un important turn-over des enseignes). Et même si les produits de beauté proviennent bien souvent des États-Unis (tresses, perruques), d'Inde ou de France, la charge nostalgique produit son effet.
Le quartier n'est toutefois pas la reproduction d'une ville africaine : «on vient ici pour retrouver l'ambiance africaine à l'européenne comme à Château Rouge à Paris» confie le photographe. Mais si dans la Capitale beaucoup de boutiques sont à même la rue, ce n'est pas le cas à la Guill', les commerçants black ne vivant pas dans ce quartier, de plus en plus coûteux, mais en périphérie.
Nadja Pobel
À la Guillotière, la petite Afrique
Au Musée africain jusqu'au dimanche 28 juillet + balade urbaine dimanche 16 juin, mercredi 10 et jeudi 11 juillet