Le 21 avril 1938 paraissait le premier numéro de Spirou, magazine jeunesse pensé comme un contrepoint moral des comics américains. Soixante-quinze ans plus tard, l'idéal de son fondateur, Jean Dupuis, n'est qu'un lointain souvenir. Son héritage en revanche est, comme veillera à le rappeler Lyon BD, plus concret que jamais.Benjamin Mialot
Les Schtroumpfs, Gaston Lagaffe, Boule et Bill, Lucky Luke... Tous ces personnages emblématiques de la BD européenne ont un point commun : ils sont nés dans les pages de l'hebdomadaire Spirou, à l'instar du groom du même nom. Pas mal pour ce qui n'était à l'origine, soit en 1938, que le résultat de l'indignation d'un imprimeur belge d'obédience catholique, Jean Dupuis, face à la pauvreté morale et éducative de la production made in USA, alors en plein boom.
La longévité de l'entreprise tient, justement, aux qualités d'entrepreneur de Dupuis et à leur perpétuation à travers ses successeurs et les rédacteurs en chef qui les servirent au fil des décennies. Qualités qui s'exprimaient autant en termes de gestion patrimoniale (au contraire de Tintin, qui disparut avec son créateur, Spirou est la propriété d'un éditeur) que de flair artistique ou d'adaptation aux évolutions du marché (après Mai 68, Spirou s'intéressa plus ostensiblement aux lecteurs adolescents).
Nouvelles galeries
Fidèle à sa convivialité originelle mais en perpétuel renouvellement, Spirou a vu défiler tout ce que la France et la Belgique ont compté de bédéastes de renom, des prestigieux représentants de ce qu'on appela "l'école de Marcinelle" (Jijé, Franquin, Peyo...), du nom de la commune où fut fondé le magazine, aux rénovateurs de la BD grand public, Lewis Trondheim en tête. Ce sont évidemment ces derniers qui viendront commémorer cette aventure à Lyon BD.
Outre le papa de Lapinot et ses collègues de l'atelier Mastodonte, mériteront ainsi d'être écoutés et courtisés Yoann, dont le trait rend vitalité et mordant à la série Spirou & Fantasio, Kris, qui de chroniques sociales (Un homme est mort) en galéjades SF (Les Brigades du temps) s'impose comme l'un des scénaristes les plus hardis du moment, ou encore Frédéric Niffle, l'actuel rédac' chef.
Mais pour vraiment prendre la mesure de l'influence de Spirou, c'est dans l'une des bibliothèques partenaires du festival qu'il faudra déambuler, à la découverte des plus belles pièces de la Galerie des illustres, du nom d'une rubrique qui, depuis 2008, voit chaque semaine un auteur différent proposer sa vision du personnage emblématique du journal. De Riad Sattouf à Jacques Tardi en passant par Blutch, Cabu ou Guy Delisle, ils sont déjà plus de deux cents à s'être prêtés au jeu.
La Galerie des illustres
Dans les bibliothèques Jean Macé, Croix-Rousse, Lyon 6, La Duchère, Saint-Jean, Lyon 1, Vaise et Part Dieu, Jusqu'au 29 juin
Rencontre avec le Spirou Tour
Au Forum Fnac Bellecour, samedi 15 juin