Dans Le Chat de Schrödinger (Gallimard, 2013) de Philippe Forest (invité de la table ronde "Être ou ne pas être : et s'il n'était pas nécessaire de choisir", jeudi 22 mai aux Subsistances), tout part d'une anecdote des plus triviales : un soir, un chat perdu entre dans le jardin de la maison de campagne du narrateur. Ce micro-événement plonge l'auteur dans des réflexions, peu à peu abyssales, sur la rencontre ou, au contraire, l'étanchéité parallèle de deux (au moins) univers : celui de la vie animale et de la vie humaine, du jour et de la nuit, de la vie et de la mort, de l'être et de son reflet. Au point de glisser vers des méditations éclairantes et poétiques sur la physique quantique de Schrödinger, de Heisenberg et d'autres : «Le plus grand des mystères se tient dans le plus petit des replis du réel. Là règnent d'autres lois que celles que nous connaissons. Là s'étend un domaine de poussières où il n'est plus inconcevable qu'une chose soit et son contraire». Grande fiction poético-philosophique, Le Chat de Schrödinger rouvre les possibles, défie les identités, redessine les points de fuite du réel et du désir. Après Le Siècle des nuages, Philippe Forest confirme là tout l'intérêt passionné que nous avons pour son œuvre.
Jean-Emmanuel Denave