Aussi surprenant que cela puisse paraître, l'espace dédié aux expositions temporaires est plus important que celui accordé à leur voisine permanente (2800 m² contre 1900 m²). Il faut dire qu'avec pas moins de 2, 2 millions d'objets en sa possession, le Musée des confluences a de la ressource. Histoire d'en montrer un maximum dès l'ouverture, il a fait le choix, judicieux, de rendre hommage à celui qui a commencé cette collection, Emile Guimet, et à la manière dont étaient présentées ses trouvailles au XVIIIe siècle : dans des cabinets de curiosité, véritables "chambres des merveilles", ainsi que le souligne le titre de l'expo. Plus de 800 pièces sont ici présentées, dans un foisonnement dont le désordre n'est qu'apparent. Tout est au contraire parfaitement agencé, en un clin d'oeil aux premières classifications, si bien que l'ensemble forme quasiment un tableau pictural avec ses rosaces faites de poissons et ses alignements quasi-pointillistes de coccinelles épinglées.
Contempler ces joyaux est une chose, voyager pour les découvrir puis les porter à la connaissance de ses congénères en est une autre qu'Emile Guimet (1836 - 1918) s'est ingénié à faire à Dresde, en Egypte puis en Extrême-Orient. Cet industriel lyonnais, dont le père fut le fondateur de Pechiney et l'inventeur de l'éclatant bleu outremer artificiel – que l'on peut ici voir en poudre – a poursuivi l'œuvre familiale tout en créant deux musées, celui d'histoire naturelle à Lyon et celui des arts asiatiques (toujours en activité) à Paris. Sa biographie scénographiée, très dense, parfois même saturée, abonde elle aussi d'objets singuliers : des céramiques japonaises du XIXe siècle, une petite étagère à pique-nique de l'époque Edo, des momies du Ptolémaïque (330 – 30 av JC) ou encore toute une série de magnifiques bouddhas – Emile Guimet a très tôt eu l'envie de développer une histoire de la pensée religieuse, épousant avant l'heure la volonté du Musée des confluences de mêler sciences et mythes.
Signe de l'exhaustivité que visent les équipes du lieu, on trouve également dans cette caverne d'Ali Baba des partitions à voir et à écouter. Car Guimet était aussi artiste, compositeur et auteur de pièces de théâtre. L'occasion d'apprendre qu'il avait un temps assuré la programmation du Théâtre Bellecour, sis dans l'ancien siège de nos confrères du Progrès, devenu depuis une Fnac !
Nadja Pobel
Dans la chambre des merveilles
Les Trésors d'Emile Guimet
Au Musée des confluences jusqu'au 26 juillet 2015