Au Bal des Ardents, rencontre avec artisans de l'humanisation de la psychiatrie.
«On ne reverra pas de sitôt une époque si excessive. Nos vieux pays n'en ont plus les moyens, ni même l'envie. Chacun a trop réellement peur de la misère pour s'offrir le luxe de tout renverser » écrit Claude Arnaud à propos des années 1970 en France. L'énergie créative de cette période vibra jusqu'à Villeurbanne où une petite bande de psys (Marcel Sassolas, Jacques Hochmann...) allait inventer une psychiatrie à échelle humaine et des structures novatrices, les maisons thérapeutiques de l'association Santé mentale et communauté.
Nourris des écrits de Harold Searles et de Winnicott, proches des expérimentations de Jean Oury à la Borde ou de Paul-Claude Racamier à Besançon, ils s'insurgent notamment contre l'enfermement asilaire, ses effets déshumanisants et désubjectivants. Les individus en prises avec la psychose trouvent au contraire à S.M.C. des lieux de vie où le soin se trame à partir de la vie de petits groupes et de la réalité quotidienne communautaire.
Soit une psychiatrie relationnelle sur le mode de la "sympathie" du philosophe Paul Ricœur qui permet aussi l'émergence de la nouveauté, de l'inattendu... Le tout visant à approcher «la psychose à rebrousse-poil» (titre d'un livre de Marcel Sassolas), c'est-à-dire à l'envers de ses tendances à la chronicité, à l'omnipotence ou aux symbioses narcissiques. Dans Douze rencontres en terrain psychotiques, Jacques Dill et Marcel Sassolas témoignent, à travers douze récits concrets, de cette aventure humaine toujours en cours. Passionnant.
Jean-Emmanuel Denave
Jacques Dill et Marcel Sassolas
Au Bal des ardents lundi 11 mai
Douze rencontres en terrain psychotique (Erès)