On y a fait de la chaudronnerie puis joué au paintball. En passe d'être reconvertie dans l'activité tertiaire, la vaste Halle Girard est de ces lieux entre-deux à l'aura industrielle impressionnante. Un lieu idoine pour Le Parfait Flâneur, exposition collective de dix jeunes artistes organisée par le Palais de Tokyo hors-les-murs et la commissaire Hilde Teerlinck. Car, parmi ces derniers, nombreux sont ceux qui justement se situent dans un entre-deux, des interstices, un espace un peu flou entre la matière et le sens.
C'est notamment le cas d'Anne-Charlotte Finel qui filme «lorsque la lumière s'échappe, se raréfie : à l'aube, au crépuscule, à l'heure bleue ou la nuit.» Parmi le grain des images, un troupeau de biches déambule sur un fond paradoxalement urbain, ou bien le halo d'une lampe torche cherche son chemin parmi une forêt hantée.
Sur certains murs du bâtiment, le plasticien Lyonnais Pierre-Olivier Arnaud a collé de grands tirages où des photographies d'origine inconnue sont tellement agrandies et retravaillées qu'elles sont réduites ici à l'état de traces, de quelques signes ou de quelques lignes et plans suggestifs.
Le collectif Polar Inertia nous propose lui aussi de nous situer dans un moment de disparition qui est concomittament un moment de métamorphose ou de changement de régime des signes et des images. Sa vidéo Can we see well enough to move on nous entraîne dans un couloir vers une lumière aveuglante. Ce qui éclaire aveugle, le retour à l'origine est aussi un retour au vide : entre les deux, le trajet est une expérience à la fois singulière et inquiétante.
«Pour cette exposition nous indique Hilde Teerlinck, je suis partie de cet espace si particulier avec l'idée de pouvoir y flâner d'un univers à un autre, sans être submergée par une trop grande quantité d'oeuvres. J'y ai cherché un rythme, une mélodie.» Une mélodie de l'entre-deux et de la fragilité des figures particulièrement émouvante, faisant de cette exposition l'une des plus réussies de la Biennale et de ses satellites.
Le Parfait Flâneur
À la Halle Girard jusqu'au 4 octobre