Si son patronyme rime avec l'Italie, son art en revanche flirte avec l'abstraction d'après-guerre. Émile Gilioli, né à Paris en 1911 d'une famille d'Italiens immigrés, est l'un des représentants phares de la sculpture abstraite des années 1950. Mais avant de distiller ses œuvres monumentales dans l'Isère, l'artiste en devenir est parti à Nice pour étudier à l'École des Arts Décoratifs.
La frivolité étudiante prend fin avec la Seconde Guerre mondiale. Alors mobilisé à Grenoble, il rencontre Andry Farcy, conservateur emblématique du Musée de Grenoble, et croise le chemin de plusieurs artistes. Une période de trouble marquée par la résistance en Vercors, qui impacte ses premières créations. À Voreppe en 1946, l'artiste livre un mémorial rendant hommage aux otages innocents tués par les Allemands. Érigé au bout d'une allée, l'homme de pierre exprime toute la quiétude de ces années noires. Le monument aux morts déportés de Grenoble (1950) installé dans le parc Paul-Mistral quant à lui commence à être taillé dans l'abstraction.
Cette dernière est totale dans l'œuvre cachée derrière l'escalier du hall d'honneur de l'Hôtel de Ville (photo). Naissant du marbre de Carrare, la sculpture donne toute la mesure d'un geste simple et expressif. Pour découvrir le reste de ses créations, le musée bibliothèque, anciennement l'atelier-maison de Émile Gilioli à Saint-Martin-de-la-Cluze, dévoile l'ensemble de son œuvre avec une exposition permanente. Charline Corubolo