Fondation Bullukian / Vincent Broquaire nous fait descendre dans les tréfonds de ses grottes et cavités dessinées. Toutes anfractuosités trompeuses, tous refuges artificiels...
Vous croyez voir un paysage, vous croyez entrer dans une grotte, marcher sur de la roche... Mais tout n'est que décor, artifice, machinerie. Le tapis de la nature, dans les dessins de Vincent Broquaire, se dérobe sous nos pieds. L'artiste, dans ses œuvres, révèle que nos illusions sont "machinées", "usinées", "numérisées" par d'étranges petits personnages formant comme une vaste et anonyme équipe de maintenance.
Souvent en noir et blanc et très épurés, les dessins de Broquaire ont la clarté d'une démonstration cartésienne ou, pour sa première exposition personnelle à Lyon, la sagacité critique d'un Platon. C'est en effet sur l'allégorie de la caverne du philosophe grec que s'appuie l'artiste : le motif de la caverne est décliné en plusieurs séries de dessins sur papier, en un dessin mural et en un dessin animé sonore projeté sur une cimaise. Platon nous avait prévenus : méfiez-vous de vos sens et des simulacres, des ombres que vous prenez pour des proies.
Paradis artificiels
Depuis 2010, le jeune artiste trentenaire explore les possibilités du dessin et de la ligne claire à travers toutes sortes de médium (ceux de son exposition à Lyon et aussi des sites Internet, des œuvres interactives, etc). Le paysage est son obsession, la caverne en est une variation. Ce motif ô combien symbolique des origines même de l'art et de la civilisation, est confronté ici à l'ère du numérique et de l'image de synthèse, comme à l'artifice de l'automate ou du décor de théâtre...
Certaines œuvres s'avèrent particulièrement troublantes : celles où les lignes brisées des reliefs naturels s'avèrent être produites par les lignes droites, artificielles, désaffectées de matrices numériques ou d'algorithmes. Il y a beaucoup d'humour et d'intelligence dans les œuvres de Vincent Broquaire, et aussi, plus sourdement, de l'angoisse : angoisse d'un monde aux fondements bouleversés, aux limites entre nature et artifice brouillées.
Vincent Broquaire, Cave Studies
À la Fondation Bullukian jusqu'au 30 juillet
Pour découvrir d'autres dessins : www.vincentbroquaire.com