Fête des Lumières / Sans installations éblouissantes mais avec des contrats bien remplis à chaque endroit ou presque, la Fête des Lumières 2018 livre une édition "normale" dont le point d'orgue sera à n'en pas douter la place Bellecour alliée à Antonin Poncet : des Anooki et des vœux.
Hôtel de Ville
Rien place des Terreaux, mais avec une installation parfaitement maîtrisée sur nappe d'électro douce, la cour de l'Hôtel de Ville vaut plus que le détour avec Tricolore de Ralf Lottig, habituellement aux manœuvres lumière de gros concerts (Phil Collins, Pink Floyd...) ou de cérémonies d'ouverture de JO (Athènes, Turin, Vancouver). Si ce n'est ce bleu-blanc-rouge trop cocardier annoncé dans le titre, il a parfaitement su envelopper cet espace sans le saturer, immerger les spectateurs dans les écraser.
Cathédrale Saint-Jean
Toujours attendue, surtout depuis les indépassables Ez3kiel en 2016, la cathédrale Saint-Jean est en proie à une boucle de six minutes 100% analogique (et pas numérique). Moins impressionnante qu'attendue au su de cette singularité, elle n'en reste pas une œuvre très originale qui végétalise la façade plus que jamais. Le mérite en revient au jeune duo Carole Purnelle et le Portugais Nuno Maya qui se faisait la main l'an dernier sur le collège Jean-Moulin. Le passage par cette place goulot d'étranglement est indispensable pour voir ces Pigments de lumière.
Place Bellecour
Nettement moins artistique mais immédiatement séduisants sont les Anooki de la place Bellecour, Une petite place pour de grands rêves. On craignait l'aspect gadget, que la place soit trop inerte ou, à l'inverse, que les projections sur l'écran de la grande roue ne cannibalise le reste. Verdict : accord parfait entre les versants de ce travail. Les deux petits inuits gonflables immobiles sont absolument irrésistibles en taille XXL (vingt mètres de haut). Dans leur salle de jeu, l'un joue avec la statue de Louis XIV, l'autre avec un réel camion de pompier. Sur écran, ils retrouvent la vitalité, mettant en scène les mêmes scènes (jouer avec un cheval et un camion). Et tout finit bien sûr par une danse dont ils ont le secret sur une musique entêtante à souhait. Chorégraphie basique qui fera danser les passants.
Place Antonin Poncet
Mais ne surtout pas négliger d'aller sur la place jumelle à Bellecour, Antonin Poncet où les visiteurs sont invités à souffler (et faire un vœu !) dans un petit tube et animent ainsi une constellation de cercle de façon différente à chaque fois. Parfaitement réussi et féerique, Wish blow est signé de la Monégasque Helen Eastwood et du Lyonnais Laurent Brun qui signent aussi la façade du Théâtre des Célestins avec Cells, courtes boucles toutes (ou presque) différentes les unes des autres où un élément du mur du théâtre est décliné en multiples cellules. Original et à regarder presque à l'infini.
Colline de Fourvière
Le travail de Damien Fontaine, Reflets, sur la somptueuse colline de Fourvière est, a contrario, beaucoup plus vite lassant. Témoignant d'un indéniable savoir-faire (il a eu en charge les Terreaux et Bellecour par le passé), cette séquence de plus de dix minutes (!) intègre beaucoup trop d'éléments divergents pour qu'elle soit cohérente. Mais elle n'en demeure pas moins captivante par instants.
Grand Hôtel Dieu
Le Grand Hôtel Dieu accueille trois œuvres dont celle (Réflexions) de Yves Caizergues, parfois associé à Nuits sonores. Il ne manque ici, sous la verrière, plus qu'un Pantha du Prince énervé pour apprécier pleinement cette installation ultra léchée.
Parc de la Tête d'Or
À la Tête d'Or, le Présage de Marie-Jeanne Gauthé et Géraud Périole remplit son contrat : un spectacle-épate avec échassiers de lumière et projection surgie du lac. Parfaitement réalisé mais trop grandiloquent.
Ailleurs
Enfin, au rang des déceptions : Abyss, place Pradel (de Nicolas Paolozzi) qui décline une bête des mers dont on voit surtout la carcasse – quand bien même cela fonctionnerait mieux que lors de notre visite où elle était encore en réglage, elle semble peu adaptée à cet espace. La gare Saint-Paul et un Quantum daté hommage à la Biennale la Danse et la place de Jacobins. Sur cette dernière, un nouveau venu, David Udovtsch, a fait avec son You and the night un mini Grandes Eaux Nocturnes du Château de Versailles. Joli, agréable mais peu inventif.
En tout, 80 installations rythment le parcours. Ne pas oublier de passer par la cour de la Fondation Bullukian (Frontier par Encor Studio et le Mirage Festival) et surtout de grimper à Fourvière pour le projet des Chinois de Canton sur l'esplanade des amphithéâtres et d'aller déambuler à l'Antiquaille voir les projets émergents de jeunes artistes voire étudiants.