Biopic / Après "Bohemian Rhapsody", le réalisateur britannique Dexter Fletcher s'attaque à la carrière d'Elton John avec "Rocketman". En se servant d'une cure de désintoxication comme base narrative. Et met face à face l'enfance du prodige introverti et son succès fulgurant d'icône de la pop culture. Démesuré et excessif.
Réaliser un film sur une rock star aussi fantasque qu'Elton John? Voilà le défi auquel s'est collé Dexter Fletcher en ne cherchant pas à raconter avec exactitude les événements passés mais en revendiquant « une course-poursuite imaginaire résolument loufoque et transgressive ». Et en privilégiant les moments-clés de la vie de l'artiste – sa rencontre avec son parolier Bernie Taupin, ses amours tumultueuses avec John Reid, son mariage blanc... Résultat ? Un film dans lequel la musique prend, bien évidemment, toute la place.
Rocketman est ainsi nourri en séquences oniriques où la star et ses fans entrent en osmose grâce à une mise en scène dont les procédés (ralentis, envolés...) exacerbent l'émotion. Une émotion bien relayée par l'acteur Taron Egerton qui réinterprète toutes les chansons et s'enflamme dans des costumes outranciers. En découle un drama pailleté flamboyant, à la fois biopic et comédie musicale. Et un film prévisible.
À la gloire d'Elton
Bien que Lee Hall (l'auteur de Billy Elliot) ait été convoqué pour raconter l'enfance malheureuse de Reginald Dwight, rejeton en manque cruel d'affection destiné à devenir l'icône de son époque, le scénario ne parvient pas à se hisser à la hauteur de la légende. À la fois biopic et comédie musicale, la surabondance de hits écrase les dialogues empêchant une réelle interaction entre les personnages. L'aspect hagiographique, enfin, est peu étonnant lorsque l'on sait qu'Elton John produit lui-même le film à sa gloire et qu'il est présenté comme le narrateur de sa propre histoire dès le premier plan.
Cet egotrip se fait au détriment des personnages secondaires inconsistants. Il se borne à illustrer l'isolement auquel condamne le star system, matérialisé par le personnage plus que perfide du manager. De quoi faire passer ses addictions pour des manies rationnelles, voire excusables. Plus que sa vie, c'est son statut de victime et ce que ce les autres (public, manager, parents...) font de Sir Elton qui semblent être le fil conducteur de ce Rocketman. Encore un peu et on nous ferait croire que l'homme-canon n'a jamais touché à la poudre...