Festival Superspectives / À travers un programme en quatre œuvres, l'Ensemble Dedalus nous immisce dans l'univers musical de l'américain David Lang, un post-minimaliste qui fait la part belle au chant et à la voix dans ses compositions.
Né à Los Angeles en 1957, étudiant en musique brillant (il ira jusqu'au doctorat, puis enseignera à la prestigieuse université de Yale), David Lang fut membre d'un groupe de rock, prit des cours avec Hans Werner Henze ou Elliott Carter, tout en écoutant Steve Reich et Jimi Hendrix, puis opta pour le système D à New York avec deux autres compositeurs pour diffuser leur musique, en créant en 1987 le "groupe-organisation" Bang on a Can. Bref, David Lang répond au joyeux cocktail US de l'artiste tout à la fois hyper formé au classique, ouvert à tous les genres musicaux, épris de nouveauté, et capable d'aller se confronter à d'autres disciplines.
Il ira du côté du cinéma (pour la musique du film Youth de Sorrentino), de la danse (en collaborant par exemple avec Edouard Lock), et encore et surtout du côté du théâtre et de l'opéra. On lui connaît d'ailleurs une bien singulière œuvre lyrique : L'opéra chuchoté créé en 2013, destiné à un public d'une quarantaine de personnes et où les chanteurs déambulent en murmurant et chuchotant près des spectateurs. Le concert, la performance live, restent pour David Lang des moments privilégiés et cruciaux de la musique, au cœur de sa démarche musicale. Au chœur aussi quand, en 2016, il réunit à New York rien moins qu'un millier de chanteurs pour The Public domain !
À la fois David et Goliath
On qualifie couramment la musique de David Lang de post-minimaliste, mais Lang connaît aussi ses classiques, a étudié de près le sérialisme, et n'hésite pas à puiser dans la pop autant que dans la musique dite sérieuse. Il porte une grande attention aux rythmes et à leurs stratifications, mais voue aux gémonies la répétition pour elle-même, qui n'initierait aucune variation.
Difficile donc de définir ce compositeur qui se remet sans cesse en selle dans des projets hétéroclites (avec Peter Greenaway, le Kronos Quartet, Steve Reich et tous ceux déjà cités ci-dessus...). Une chose ressort néanmoins de son éclectisme et de sa curiosité tous azimuts : l'importance du chant et de la voix, qu'elle soit chuchotée ou démesurée, opératique ou plus intimiste, solitaire ou hyper chorale... À travers la voix, David Lang entrecroise aussi souvent son double intérêt pour l'aspect non narratif de la musique et la narrativité propre à la littérature (avec des textes qu'il écrit lui-même ou qu'il emprunte à Andersen, Ambrose Bierce, Shakespeare, Coleridge...).
La soirée concert David Lang présentée à Lyon est centrée sur l'œuvre Death speaks, où guitare électrique, voix, piano et violon oscillent entre son rock, écriture savante et musique contemporaine, et où un chant féminin est prégnant. Ce concert a été créé en 2017 par l'Ensemble Dedalus installé dans le sud de la France avec des musiciens l'Orchestre National de Jazz. Son étape lyonnaise est une belle occasion de découvrir l'univers riche et polychrome de David Lang.
David Lang, Death Speaks, par L'Esemble Dedalus
À la Maison de Lorette dans le cadre du Festival Superspectives le jeudi 8 juillet
Repères
1957 : Naissance à Los Angeles
1987 : Un de ses premiers enregistrements Are you experienced s'inspire de l'album éponyme de Jimi Hendrix. Fondation de Bang on a Can avec Julia Wolfe et Michael Gordon
1999 : Collaborations avec le Kronos Quartet, pour la musique du film Requiem for a dream
2008 : Prix Pulitzer de la musique pour La Passion de la Petite Fille aux allumettes, inspiré à la fois du conte d'Andersen et de la Passion selon Saint-Matthieu de Bach
2013 : Création de L'Opéra chuchoté
2016 : Création à New York de The Public domain, avec... un millier de choristes !