Deep House / Toute juste de retour dans le paysage nocturne lyonnais après une trop longue absence, L'Ambassade accueille une figure de la deep house française : Franck Roger, auteur d'un récent album étonnant de diversité.
Franck Roger n'est pas un nom qui rayonne sur les line-up de festivals où jeunes stars éphémères aux milliers de suiveurs Instagram et vieilles légendes d'une techno de hangars plus adaptée au masses règnent en maîtresses. D'ailleurs DJ Deep, un proche de Franck, a trouvé place sur ces gros raouts des années 2010 quand il a troqué sa house soyeuse pour des kicks et des ambiances plus lourdes venues tout droit du Berghain, à Berlin. Franck Roger, lui, n'a pas dévié de sa ligne : celle d'un esthète, pour qui les racines soul et gospel de la house sont indissociables de cette musique de club avant tout, faite pour l'intimité et la danse all night long, s'inscrivant dans le sillage du disco façon Paradise Garage, un DJ pour qui Larry Levan et David Mancuso sont des mythes et pour qui le BPM reste le plus souvent aux alentours de 120, là où il colle au cœur.
Lancée vers la fin des années 90 (1997 côté DJ, deux ans plus tard pour ses premiers disques), sa carrière aux platines, en tant que compositeur mais aussi de label manager (Real Tone, c'est son label pour ses propres sons mais aussi plus tard un lieu d'accueil pour Maya Jane Coles, Shonky, Dyed Soundorom, The Martinez Brothers et d'autres), explore les racines de la house tout en les recombinant avec une certaine modernité. Ces racines, ils les a découvertes et apprises à l'écoute des plus grands, l'oreille collée au poste de radio, fréquence FG, écoutant religieusement le show hebdomadaire du suscité DJ Deep et de Grégory — une autre figure du genre —, A Deep Groove Radio Show. Selon la légende, le jeune homme enregistrait méthodiquement chaque émission avant d'en extraire la tracklist (sans Shazam...) et d'aller choper les disques dans les — alors nombreuses — boutiques parisiennes.
44
Côté composition, il travaille beaucoup autour du sample. C'est en 2004 que vient la reconnaissance, quand il lâche le titre No More Believe sur les dancefloors. Succès qui ne se démentira pas du côté des soulfull clubbers, ceux qui traînent au Djoon parisien comme à L'Ambassade lyonnaise, ces derniers spots où l'on reste fidèles à la ligne de la house originelle, celle incarnée par un Mandel Turner par exemple qui collabora avec Franck Roger sur After All pour une pépite vocale qui régala, aussi, les pistes.
Après tant d'années à faire vibrer les dancefloors, Franck Roger a dévoilé une autre part de lui-même au printemps 2021, l'effet confinement sans doute : son album 44 (son âge) recèle de chemins de traverse amenant l'artiste au-delà des champs d'expression qu'on lui connaissait, jusque vers le rock psychédélique, l'ambient ou encore le dowtempo — voire même la pop 80's par moments, un album résolument construit pour l'écoute domestique, pas si éloigné dans la démarche que The Cloud Making Machine d'un certain Laurent Garnier en 2005. Une exploration d'influences passées, de sons écoutés à la maison, une envie de regarder l'avenir autrement : autant de motivations, durant une longue période sans aucune dates de DJ, qui l'ont poussé à faire ce travail aussi introspectif que réussi, risqué aussi.
Lui qui a suivi l'évolution de la deep house, son appropriation judicieuse par des artistes Sud-Africains tels Culoe de Song, qui a signé la star Black Coffee sur l'un de ses labels, a bien évidemment beaucoup de points communs avec Manoo, le boss de L'Ambassade, lui-même DJ. Ils ont d'ailleurs partagé les platines du Djoon il y a quelques jours : c'est donc un peu à la maison que vient se poser Franck Roger ce vendredi.
Franck Roger
À L'Ambassade le vendredi 22 octobre dès minuit