Désormais réfugiée politique en France avec sa troupe du KnAM, la Russe Tatiana Frolova crée « Nous ne sommes plus... » au cours du festival qui l'accueille depuis 2011, un récit documentaire de leur fuite et la terreur imposée par Poutine en Ukraine et bien avant cette guerre-là.
Lors des répétitions au début de l'été, il y avait dans la boite noire de L'Assemblée (le théâtre qui a remplacé les Asphodèles dans le 3e arrondissement), des poignées de terre, quelques cailloux, des cartons avec écrit au feutre « De 1917 à 1991, 20 millions de personnes ont été victimes du communisme en Russie », « Entre 1917 et 1953, la Russie a perdu 1/3 de sa population du fait des guerres, de la famine et de la répression », un autre avec le mot « paix » ; il y avait aussi Le Livre noir du communisme en version Pocket, une tasse à l'effigie de Lénine, une faucille sur laquelle est posée, comme sur le drapeau, un marteau. Tatiana Frolova, artiste associée au théâtre des Célestins où elle crée ce spectacle, s'est, depuis une vingtaine d'années et la mort de sa mère en 2005, tournée vers le théâtre documentaire pour mieux comprendre d'où elle venait. Elle fouille dans les archives personnelles de sa famille et celles de sa troupe qu'elle a fondé en 1985, à Komsomolsk-sur-Amour, si loin de Moscou, en Sibérie.
(Komsomolsk sur) Amour en fuite
Ensemble, ils poursuivent donc ce travail avec Nous ne sommes plus... qui a pour point de départ leur migration définitive et sur ce que c'est que de compacter sa vie en 23 kg, ceux autorisés dans une valise en soute. « Désormais je veux oublier la Russie dit Tatiana Frolova, je veux apprendre d'autres langues. Je veux parler français [NDLR, elle le maitrise déjà très bien]. C'est fini avec la Russie. Ça m'a pris beaucoup de temps car ce n'est pas rien comme décision ». Cette création sera cependant jouée dans sa langue maternelle par ses six acolytes sans concession comme les pièces antérieures sur la mémoire et l'oubli (Je suis), les morts silencieux (Le Songe de Sonia), la Tchétchénie (Une guerre personnelle), l'absence d'avenir (Ma Petite Antarctique) et même sur l'équilibre intérieur quand tout s'effrite au dehors dans (Le Bonheur).
Nous ne sommes plus...
Aux Célestins, du 17 au 28 octobre
Dans le cadre du festival Sens interdits