Après quatorze mois de travaux, de rénovation et d'agrandissement, le cinéma Gérard Philippe de Vénissieux a rouvert ses portes au public le mercredi 14 avril, deux semaines avant son inauguration officielle le 29 avril. Romain Vallet
La programmation, pour sa part, semble esquisser un pas de deux entre les productions à gros budgets bénéficiant d'une couverture médiatique très importante, et des œuvres un peu plus discrètes, ou tout du moins qu'on ne retrouvera pas à l'affiche des multiplexes. Le cinéma Gérard Philippe cherche visiblement à éviter un double écueil : celui du cinéma faussement populaire et véritablement démago comme celui du cinéma auteurisant. Cette volonté affichée n'empêche sans doute pas quelques maladresses, mais la direction a le mérite de maintenir vivant un équipement culturel essentiel et unique à Vénissieux. De surcroît, un effort tout particulier a été fait en direction des enfants, à qui s'adressent plus spécifiquement "Ponyo sur la falaise" cette semaine et "Mia et le Migou" la semaine prochaine.Un contexte difficile
Cette réouverture, quoique très attendue par les Vénissians, s'opère dans un contexte plutôt maussade pour ce petit cinéma municipal, qui devra désormais faire face à la concurrence du multiplexe Pathé implanté au Carré de Soie. Par ailleurs, le cinéma Gérard Philippe vit toujours sous la menace de la plainte déposée auprès du préfet du Rhône par UniCiné, le syndicat professionnel regroupant la plupart des grands groupes comme Pathé, MK2 ou UGC. Le même UniCiné s'était déjà distingué par le passé en contestant l'attribution de subventions au Comoedia par le Centre National de la Cinématographie (CNC), jugeant que celles-ci faussaient la concurrence. Cette fois-ci, il conteste l'autorisation d'extension accordée au cinéma Gérard Philippe par la Commission départementale d'équipement commercial (CDED). UniCiné a également accusé la mairie de Vénissieux de fausser la concurrence en subventionnant largement le cinéma Gérard Philippe, ce qui lui permet de proposer des tarifs assez bas et en tout cas très en-dessous des prix pratiqués dans les multiplexes. Nul ne sait pour l'heure si le pot de terre aura raison du pot de fer : le dossier n'est pas clos et l'équipe municipale de Vénissieux attend toujours que la justice tranche.
Par ailleurs, le directeur du cinéma, Gérard Petit, dit également : «faire face aux pressions des grands distributeurs, qui n'hésitent plus à refuser une copie de leurs films pour cause de projections trop rares». Ceux-ci souhaiteraient en effet que, comme dans un multiplexe, chaque film soit projeté dans une salle qui lui serait propre à plusieurs reprises dans la même journée, une exigence irréalisable pour un cinéma de petite taille, et qui limiterait la programmation du cinéma Gérard Philippe à trois films par semaine (contre six cette semaine et huit la semaine prochaine). Un appauvrissement de la programmation qui nuirait à sa qualité et à sa diversité, et ferait sans doute passer à la trappe des œuvres aussi remarquables que "De l'influence des rayons gamma sur le comportement des marguerites" (le très beau film de Paul Newman programmé mercredi soir) ou les deux courts-métrages de Buster Keaton qui seront projetés et simultanément mis en musique par Jean-Claude Guerre mercredi prochain. Arguant qu'«il ne saurait y avoir de diversité des œuvres sans diversité des salles» et bénéficiant aussi bien du soutien de la majorité de ses habitants que de la mobilisation des milieux culturels de l'est lyonnais, la mairie de Vénissieux a lancé une pétition déjà signée par plus 9 000 personnes.Pétition en ligne :