Google-mapé quelque part entre Lyon et Genève, on ne sait trop d'où viennent ces Rebels (étant donné qu'ils n'ont jamais mis les pieds à Tijuana, contrairement à ce que laisse entendre leur nom). Ni de quelle époque. Quoi qu'il en soit leur musique revival, entre rock 60's psychédélique et yéyé à suspension ironique, aurait tout à fait sa place sur la BO forcément vintage en diable d'une nouvelle «post-modernerie» tarantinienne à la pellicule grattée.
Pas étonnant que les Rebels aient tapé dans l'oreille du grand Jon Spencer, pour qui le rock 'n'roll à l'ancienne est une religion, à ceci près qu'il en est le Dieu. Ainsi, les Rebels ont-ils eu la joie et le privilège de recevoir un petit courrier électronique personnel du leader de Blues Explosion et Heavy Trash, leur priant de bien vouloir avoir l'amabilité d'officier en ouverture de trois de ses concerts dans l'Ouest de la France. Un honneur qui ne se refuse pas. Il faut dire que comme chez Jon Spencer, les Rebels ont ingéré une quantité invraisemblable de matière musicale qu'après maintes ruminations ils restituent avec une efficacité d'autant plus bluffante qu'ils le font la plupart du temps en français.
Entre influences anglaises, mods ou pop (l'inénarrable Johnny Marr, en référence au guitariste des Smiths), lévitations psychédéliques violentées d'infra-basses ou caressées de claviers doorsiens, clins d'œil country et même élans gainsbourgiens brillamment assumés (sors d'ici Lulu, avec ton album tout pourri de reprises de papa), les Rebels n'abandonnent que très rarement la langue de Dutronc, autre référence palpable dans cette élégance «guindégingandée». Ou alors pour la mélanger furtivement à l'anglais, sans même qu'on ne s'aperçoive. Elégante, La Bourgeoise qui donne son titre à cet album est apprêtée et sauvage, joueuse et appliquée, séductrice et rebelle. Elle souligne, comme un mascara, par ses manières – une production au cordeau –, l'avènement d'un groupe qui, s'il continue de la sorte, risque de compter. «Cette fille, n'est pas pour moi, je bien suis trop maladroit pour aimer cette bourgeoise», chantent les Rebels of Tijuana. Au point qu'en écoutant ce foutu album, on a effectivement l'impression de ne pas le mériter.
La Bourgeoise (Le Pop Club/Echo Orange).
Édition digipack, sur http://handsandarms.com ou sur les plateformes numériques.