Tenants d'un rock francophone qui trempe un sens aigu de la modernité dans une marinade de références nostalgiques, le trio clermontois Mustang et les Lyonno-Helvètes The Rebels of Tijuana brouillent toute notion de temporalité musicale. Leurs albums Tabou et La Bourgeoise livrent d'étonnantes madeleines de Proust, évoquant autant un passé pionnier qu'elles dessinent un avenir rétro-futuriste. Ca valait bien un questionnaire ad hoc avant livraison live au Marché Gare. Stéphane Duchêne
En dehors de toute considération géographique, d'où venez-vous réellement ?
Mustang : On a beau être obsédé par les racines musicales, la question la plus importante est toujours «où on va ?» : vers plus de succès, de meilleures chansons, des costumes avec des tissus de meilleure qualité.
The Rebels of Tijuana : D'une époque où nos parents étaient gamins et d'endroits où nous ne sommes jamais allés mais nous fascinent (Laurel Canyon, le Sunset Strip). Notre Swinging London à nous, c'est un mix de culture underground et de 60 ans de culture de masse, le tout en digestion permanente.
Votre devise ?
M : «Never explain - never complain», difficile à suivre...
TROT : «Ma jaguar, ma femme et l'amour !»
Votre principal trait de caractère ?
M : Notre liberté. On ne s'est jamais interdit quoi que ce soit.
TROT : La pédale Fuzz ! Et une bonne humeur permanente. C'est très important dans le bon fonctionnement de «l'orchestre» comme disent les Blues Brothers.
Quels sont les lieux communs sur votre groupe qui vous agacent le plus ?
M : Le décorum 50's' – drive-in, milk-shake – franchement réducteur, mais c'est un biais comme un autre pour jeter une oreille à ce qu'on fait.
TROT : «C'est bien ce que vous faites, j'adore Louis Bertignac !»
Le vers clé pour comprendre votre album ?
M : «Où devrai-je aller pour trouver la foi»
TROT : «Cette fille n'est pas pour moi, je suis trop maladroit»
Vos héros du passé dans le rock ?
M : Iggy pop, héroïque de nature, Elvis, Alan Vega, Frank Black, Buddy Holly, Kraftwerk, Bo Diddley. Les Rolling Stones ! Parce qu'avec le filet de voix du chanteur, un guitariste à la ramasse, un batteur distrait et un bassiste à tête de poireau, ils ont réussi à faire quelque chose d'incroyable !
TROT : Neil Young, les Small Faces, Gram Parsons, Keith Richards, Gene Clark, leur musique, leurs albums, leurs gueules.
Le groupe que vous aimeriez être ?
M : Soyons dingues, les Beatles ou les Stones ! Les Stooges ! Ou David Bowie. Le mec a tout fait, des disques pop, des disques expérimentaux. Il en a vendu des tonnes, et il en a produit pour d'autres artistes qui ont cartonnés. Et en plus de ça il est (était ?) beau. What else ?
TROT : Wilco.
Celui auquel vous seriez malheureux d'être comparé ?
M : Les Forbans.
TROT : Noir Désir.
Le grand classique musical qui vous tombe des mains ?
M : Sergent Pepper's des Beatles, malgré quelque perles, et In The Court Of Crimson King de King Crimson. Jamais compris pourquoi ce disque est devenu culte.
TROT : Born to run de Springsteen. Springsteen en général. J'aime bien le mec, mais je ne comprends pas son succès.
Le fait musical que vous admirez le plus ?
M : La révélation d'Elvis chez Sun Records, je me lasse pas d'entendre cette histoire.
TROT : La résistance musicale dans des pays comme l'Iran ou l'on interdit toutes formes de cultures alternatives.
Votre plus gros raté ?
M : Beaucoup de concerts à nos débuts, pour cause d'excès de timidité et d'alcool...
TROT : Un craquage de pantalon en montant sur la batterie pendant un concert consécutif à un bon repas.
Le pays, l'époque où vous désireriez vivre ?
M : Pour le pays, l'Argentine. Pour l'époque, disons les années 4000. Le futur est plus attirant que le passé.
TROT : 1970, Los Angeles, musicien de studio pour les Doors, «Hi Jim ! L.A. Woman today ?». Mais je suis sorti du rêve adolescent du rock. Je ne me pose plus trop la question du bon endroit au bon moment.
L'endroit où vous rêveriez de jouer et/ou d'enregistrer ?
M : Le Grand Ole Opry à Nashville.
TROT : Avec Dan Auerbach (Black Keys) dans son studio. Il a enregistré des tonnes de groupes (folk, pop, garage, blues) et ses productions sont savoureuses.
Que répondez-vous à la phrase de John Lennon : «Le rock français c'est comme le vin anglais» ?
M : C'est un peu vrai, un peu faux... Mais je crois que certains trucs qu'on fait valent largement certains groupes anglo-saxons...
TROT : Ils font des très bons vins anglais aujourd'hui, il y en a peu et ils ne sont pas donnés mais ça existe. On va dire que la mondialisation a fait du bien. À quand le bon vin chinois ?
Comment aimeriez-vous que votre groupe meure ?
M : Un qui meure, un en taule et le dernier qui fait une carrière solo ratée.
TROT : En finale de coupe du monde contre les Rolling Stones.
À quoi faut-il s'attendre en concert ?
M : De la sueur, de la joie, des larmes, du fun, de l'orgue, des guitares, des boîtes à rythmes, des bonnes chansons.
TROT : À mettre La Bourgeoise en mode «gitane».
Mustang + The Rebels of Tijuana
Au Marché Gare
Jeudi 15 mars