Maintenir un jeune metteur en scène à la tête d'un théâtre serait-elle la dernière utopie en date du milieu culturel ? Alors que récemment encore, dans le passionnant Mai, juin, juillet créé au TNP en octobre par Christian Schiaretti, on pouvait voir un double de Roger Planchon réclamer haut et fort, lors de la Déclaration de Villeurbanne en 1968, la nécessité de donner le pouvoir aux jeunes créateurs, quid de la réalité ? Simon Delétang, 34 ans, quitte la direction du Théâtre des Ateliers faute d'avoir pu en prendre totalement les rennes.
Pourtant en 2008, une proposition de co-direction lui avait été faite pour assurer en deux ans la transition avec Gilles Chavassieux, directeur fondateur du lieu depuis 35 ans. Depuis plus d'une saison, Simon Déletang, comédien formé à l'ENSATT, était bien seul directeur dans la nomenclature mais devait cohabiter avec la figure tutélaire notamment auprès des financeurs (dans l'ordre, Etat, Région, Département – qui vient de baisser de 50% son apport – et Ville de Lyon). Las, Delétang reprend sa liberté heureux d'avoir pu grandir aux Ateliers (huit créations dont le délirant For ever Müller).
Il redevient comédien dès cette semaine dans la Trilogie de Büchner (mis en scène par Ludovic Lagarde à Reims et Paris) en attendant de monter une compagnie et de revenir aux textes du XIXe avec l'adaptation d'Un fils de notre temps d'Ödön von Horvath. Mais puisque accueillir des compagnies, les aider à monter leurs projets le passionne, il briguera bientôt à nouveau la direction d'un théâtre, à commencer par celle du Point du Jour, dont le sort ne devrait plus tarder à être connu. Il reconnait cependant qu'aujourd'hui, peu de crédit est donné à sa nouvelle génération : «on a du mal à être pris au sérieux, on s'entend toujours répondre qu'on a le temps, qu'on est jeune». Simon Delétang, lui, ne veut plus attendre.
Nadja Pobel