Les mathématiques pythagoriciennes nous enseignent que le cercle est la figure géométrique la plus pure. Cette théorie bimillénaire, le quatuor britannique Alt-J la balaye d'un geste pop d'une grâce inouïe : la perfection, tenez-le vous pour dit, est en fait triangulaire. Benjamin Mialot
Satanés rosbifs, ils ne ratent jamais une occasion de nous faire rager. Ils achètent nos campagnes là où nous devons économiser pour passer ne serait-ce qu'un week-end dans leur capitale, ils mettent en déroute nos monarques tandis que nous rêvons de fêter avec eux le jubilé des leurs, ils nous piquent l'organisation des Jeux Olympiques d'été au moment même où nous étions assurés de faire oublier le cuisant échec de nos deux candidatures précédentes... Bonjour l'entente cordiale.
Depuis le début de l'année, c'est le pompon : alors que la musique pop ne s'est jamais aussi bien portée de ce côté-ci de la Manche, comme suffisent à en témoigner les signatures de François & The Atlas Mountains et Melody's Echo Chamber chez Domino (un label anglais, comme par hasard) et celle des Concrete Knives chez Bella Union (un autre label anglais, comme par hasard encore), voilà que toute une génération de perfides Albionais la fait carrément entrer dans une nouvelle ère.
Génération ré-enchantée
Leurs groupes ont pour nom Breton, We Have Band ou Django Django et ils ont en commun d'avoir grandi au son des galettes de déconstruction de Radiohead plutôt qu'au contact des planchettes de construction Kapla et d'avoir pleinement conscience des possibilités sans cesse renouvelées qu'offre Internet en matière d'imagerie virale et de débrouille collective.
Alt-J est, avec Plugs, qu'on se languit de voir fouler une scène lyonnaise d'ici la fin de la saison, le plus épatant d'entre eux. Le plus estimé aussi. Au point que le tout premier concert lyonnais de ce quatuor de diplômés des beaux-arts et de lettres de Leeds, baptisé en référence au raccourci Mac permettant de dessiner un delta, est complet depuis des semaines.
Au point, surtout, d'avoir raflé cet automne le très convoité Mercury Prize, qui chaque année consacre l'artiste musical britannique le plus influent de son temps. Des marques de reconnaissance aussi méritées que miraculeuses : avec ses murmures à l'accent africain et ses syncopes urbaines, ses savants arrangements de claviers et ses arpèges intimistes, son hommage sur boucles orientales au photographe Robert Capa et ses métaphores sexuelles prononcées sur fond de distorsion, leur premier album, An Awesome Wave, est un disque également insaisissable et magnifique.
Alt-J + Erotic Market
au Marché Gare, lundi 26 novembre