Déception pour le nouveau Pixar : la greffe entre l'univers de "Monstres et Cie" et celle du film de campus ne prend qu'à moitié, et le scénario paraît bien attendu par rapport à celui du précédent "Rebelle".Christophe Chabert
On se souvient avec émotion de Monstres et Cie, peut-être le film qui a fait basculer Pixar dans la cour des grands. L'allégorie sur l'entertainment hollywoodien s'y déployait à travers un récit mené tambour battant et passant par toutes les émotions possibles — la moindre des choses pour un film où le carburant était justement une émotion, en l'occurrence la peur. Plutôt que de lui donner une suite, le studio a choisi de retourner aux origines de ses héros et de greffer l'univers des terreurs d'élite sur celui du teen movie.
Sully et Bob "retournent" donc à l'université, avec un antagonisme fort : le premier n'est que le descendant un peu glandeur d'une légende de l'effroi, le deuxième est un gringalet qui veut réussir malgré ses maigres atouts et met toute son énergie dans un bachotage effréné. Le campus est à peine différent de ceux qui forment l'ordinaire du cinéma adolescent américain : des nerds et des bullies, des confréries et des soirées entre étudiants...
C'est la première déception du film : plutôt que de renouveler les codes ou d'en fournir une critique, Monstres Academy se contente la plupart du temps de les reproduire en remplaçant les humains par un bestiaire de créatures bizarres, dont peu ont vraiment droit à autre chose qu'une figuration pittoresque. Comme si Pixar privilégiait la quantité à la qualité, la prolifération plutôt que l'approfondissement.
Pixar monstre ses limites...
Certes, le film prend fait et cause pour les marginaux et les losers, fidèle à la tradition Hugues-Apatow ; mais cela ne suffit ni pour étonner, ni pour créer un sous-texte passionnant au sein du récit. Après le scénario tout en surprises et en subtiles interrogations existentielles de Rebelle, Monstres Academy paraît bien prévisible, notamment son deuxième acte qui se concentre sur un grand tournoi de la peur, vaine et transparente surenchère face aux parties de quidditch d'Harry Potter.
Il faut attendre la dernière demi-heure pour qu'enfin la touche Pixar reprenne le dessus. C'est aussi le moment où le film sort de son cadre initial pour retrouver les terres du premier volet. Le temps d'une séquence magistrale, on constate d'ailleurs que Pixar est beaucoup plus à l'aise pour déconstruire les codes du cinéma de terreur et en livrer les clés que pour s'aventurer vers ceux de l'adolescence.
On s'en doutait : rien de moins régressif que ce studio qui, même en mode mineur, reste très au-dessus du cinéma d'animation US actuel.
Monstres academy
De Dan Scanlon (ÉU, 1h44) animation