On n'a pas toujours les lecteurs qu'on mérite. Prenez la science-fiction. Hormis une poignée de fanatiques aux doigts gras, qui se soucie de cette branche de la littérature qui, pour reprendre la définition qu'en donnait Isaac Asimov, se «soucie des réponses de l'être humain aux progrès de la science et de la technologie» ? Malgré les efforts d'une structure comme AOA Prod pour la sortir de l'ornière geek, notamment via le festival des Intergalactiques, pas grand monde. L'époque où l'expression ne désignait que des spooky tales mal dégrossis est pourtant largement révolue. Depuis les années 60 en fait, période à laquelle a déferlé depuis l'Angleterre puis les États-Unis une Nouvelle Vague d'auteurs formellement plus ambitieuse et socialement plus en prise avec son temps.
Au même titre qu'Asimov justement, ou Philip K. Dick, le New-yorkais Norman Spinrad en fut l'une des principales figures, grâce à des œuvres aussi sulfureuses qu'iconoclastes, Jack Barron et l'éternité (une virulente critique des médias de masse et de la politique sur fond de course à l'immortalité) et Rêve de fer (une vertigineuse mise en abîme qui le voit imaginer le livre, forcément obsessionnel, qu'aurait pu écrire Hitler s'il s'était reconverti en écrivain de SF) en tête. Aujourd'hui septuagénaire, Spinrad a à son actif une trentaine d'ouvrages et pas mal de monuments – ajoutons le spirituel L'Enfant de la Fortune et l'écolo La Grande Guerre des bleus et des roses. Et si l'on vous parle de lui, c'est parce qu'il est l'un des invités de la deuxième édition du festival susmentionné.
Benjamin Mialot
Les Intergalactiques, du vendredi 25 au jeudi 31 octobre