L'URDLA présente la "Maison enchantée", passionnante exposition monographique permettant de découvrir l'univers artistique, tissé de rencontres, de Florentine et Alexandre lamarche-Ovize.Jean-Emmanuel Denave
Comme dans celle de Marko Velk à la galerie Pallade, l'exposition de l'URDLA propose une porte à franchir. Une porte inutile en l'occurrence, ouvrant sur du vide. Un seuil, un entre-deux, un battement qui consonne avec le travail à quatre mains du couple d'artistes Florentine et Alexandre Lamarche-Ovize. Florentine s'attèle plutôt au dessin et Alexandre à la mise en espace, les deux comparses travaillant en décalage sur les mêmes oeuvres comme pour un jeu de questions-réponses. Leur grande installation Diary ("journal intime") est composée d'une multitude de dessins classés par thématiques qui évoquent chacune un pan de la vie quotidienne des artistes : leurs déplacements en transports en commun, leurs trajets vers l'atelier, leurs ustensiles de vaisselle, etc. Des taches et une résine translucide les recouvrent ou les ponctuent ici et là, formant une sorte de réseau matériel réunissant les motifs dessinés autant qu'il les trouble. «Le quotidien s'organise à partir à la fois de la fragmentation et de la ritualisation-répétition de gestes et de scènes triviales» commente Florentine Lamarche-Ovize. On tente d'y mettre à distance le hasard, mais celui-ci revient sous forme de petits accidents et distorsions.
Rencontres
La suite de l'exposition décline la notion de paysage, qu'il soit forestier ou périurbain, à travers un dessin mural, des estampes, quelques céramiques... Le travail d'estampe effectué à l'URDLA entremêle sur une même feuille de papier plusieurs "couches" réalisées à partir de plusieurs techniques : lithographie, gravure, linogravure. Passionnés par les origines historiques de la gravure autant que par la bande dessinée, les deux artistes travaillent l'image à la fois dans sa profondeur (ils tentent de "creuser" les choses) et dans son extension périphérique. Toute image pour eux est ainsi une image à "lire", car construite par différentes strates d'images, différents styles, différentes textures. Au même titre qu'un individu : «Ce qui est vraiment beau, ce sont toutes ces couches de temps, toutes ces couches des autres qui finalement constituent aussi l'individu». La création artistique, comme la création de soi, procède de l'entre-deux et de la rencontre. Entre-deux que les Japonais nomment l'aïda et que le phénomènologue Bin Kimura définiti ainsi : «Pour les Japonais, l'individu ne saurait d'abord être envisagé en tant que monade isolée instaurant après-coup une relation avec les autres. Au contraire, ils considèrent que l'aïda interpersonnel est première et qu'ensuite seulement il s'actualise sous la forme de soi-même et des autres».
Florentine & Alexandre Lamarche-Ovize
A l'URDLA à Villeurbanne, jusqu'au vendredi 21 novembre