La Maîtrise de l'enfer à la Renaissance

La Maîtrise de l'enfer à la Renaissance
Les enfants du Levant

Théâtre de la Renaissance

ce spectacle n'est pas à l'affiche actuellement

Théâtre / D'une dureté sans nom, la vie de gamins sur l'île du Levant à la fin du XIXe siècle est magnifiquement restituée par la Maîtrise de l'Opéra. Travail haut de gamme mené par la metteuse en scène Pauline Laidet.

Aujourd'hui surface dédiée au naturisme au large de Hyères dans la France varoise, l'île du Levant fut au tournant du XIXe siècle une terre brutale pour des gamins touts petits jusqu'à vingt ans, délinquants ou orphelins, malmenés par la vie. Là-bas, au grand air et au soleil, le comte de Pourtalès a voulu que son île soit un refuge, « une colonie agricole ». Mais alors que Napoléon a autorisé en 1850 l'ouverture des bagnes pour mineurs, un directeur (Olivier Borle, fidèle de la troupe du TNP) sans foi ni loi s'occupe de faire marcher droit. Les prévenances de l'infirmière désemparée devant tant de maltraitance n'y pourront rien.

Composée d'une centaine d'enfants, la Maîtrise de l'Opéra de Lyon se déploie avec trente minots sur le plateau, à raison de deux castings différents en alternance. De toute évidence, leurs compétences individuelles, et surtout le degré de travail collectif entre eux, est très haut. Constamment en scène, éclipsant les adultes, ils portent ces 80 minutes de spectacle avec l'orchestre et le chœur dirigé par Karine Locatelli, qui leur est familière puisqu'elle les a préparés sur des productions récentes comme le GerMania d'Alexander Raskatov.

Au bagne, etc

Apparaissant en filigrane derrière un tulle en préambule, comme dessinés, ces enfants ne sont que des ombres que la metteuse en scène (récemment recalée de la direction du Point du Jour dans son binôme avec Baptiste Guiton) va progressivement mettre en lumière.

Le décor (une mer au loin sur cyclo, une terre aride et un ponton sur les planches) est assez intemporel pour qu'émergent les images des migrants d'aujourd'hui. Ceux-ci, en effet, cherchent aussi à fuir, y compris sur « une vieille porte » en guise de radeau. Numérotés, presque tagués, ils questionnent férocement : « pour rester un enfant c'est combien ? Pour mourir sans rien dire c'est combien ? » S'ils sont parfois trop fringuants pour laisser réellement apercevoir la famine qu'ils chantent, ce groupe est d'une constante clarté dans son élocution, que ce soit pour un requiem solennel ou dans leur terrifiante insurrection les uns envers les autres, laissant poindre la sauvagerie dans laquelle la violence des adultes les a conduits.

Les Enfants du Levant
À la Renaissance jusqu'au 12 avril

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