Cabaret / Cabaret parfaitement ficelé, Miz B & Mr G est aussi rigoureux que divertissant. De surcroît politique et féministe. On a connu des rentrées moins aimables !
Peut-être bien que ce spectacle est la quintessence de tout ce qui nous a manqué et nous manque. Ce qui nous a manqué à cause de la Covid : se serrer dans une salle, rire, applaudir ensemble, se sourire, regarder celui/celle qui nous accompagne et lui faire lire sur notre visage que ce que nous voyons sur scène nous relie. Ce qui nous manque : sortir du conformisme d'une France qui n'en finit plus de se recroqueviller.
Alors Johan Boutin, musicien, diplômé du Conservatoire de théâtre de Lyon, attrape son micro et chante accompagné du pianiste Tom Georgel, issu du Cons' supérieur de Paris. Le duo excelle à enchaîner des textes parfois d'autres générations (Ginette Garcin, Jacques Brel...) à celle de maintenant (Stromae et ses rendez-vous aux prochaines règles séduit toujours). Gainsbourg, Barbara, l'incontournable Brigitte Fontaine passent par là, les bluettes de Michel Berger font office de sucrerie au même titre que la Foule sentimentale d'un Souchon qui n'est qu'un chanteur – pas un poète comme s'emballe Télérama – et c'est déjà bien comme ça.
Ces gens-là
Mais il ne s'agit pas là d'un juke box fatigué. Vêtu avec soin et élégance d'une robe, d'un pantalon, maquillé de blanc comme une marionnette sur laquelle tout pourrait être projeté (et que Bowie aurait hachurée par endroits), Johan Boutin est unisexe, dépassant la question de genre par ses ritournelles parfaitement interprétée, parfois malaxées tout en accélération (L'Aigle noir) ou en drôlerie (Ah vous dirai-je maman bien plus trash qu'on ne le croyait).
Ce spectacle né au Lavoir Public, passé par l'Élysée, sera accueilli dans le hall du théâtre pour une disposition cabaret. À table, en train de boire un verre, ce sont aussi les écrits de Virginie Despentes, Wendy Delorme, Édouard Louis ou ceux du Comité Invisible qui nous parviennent. « De générations en générations nous sommes de plus en plus nombreux à être surnuméraires, à être inutiles au monde ». Et de questionner le salariat. Le regretté David Graeber est perché sur notre épaule en entendant cela. Trouver le sens et « savoir comment vivre ». En réinjectant encore et toujours entre chansonnette et chef d'œuvre l'hymne du MLF qui résonne en ces temps restreints et assis comme l'irrévérence ultime : « Debout ! Debout ! Debout ! ».
Miz B & Mr G
Aux Clochards Célestes du mercredi 30 septembre au dimanche 4 octobre à 19h30 sf sam et dim à 16h30
Au Bac à Sable
À noter : un autre spectacle de ces mêmes artistes, Les 12 Travelos d'Hercule, est présenté au Bac à Sable le mardi 29 septembre.