Les Éternels / Auréolée de son triomphe aux Oscar pour Nomadland, Chloé Zhao est la véritable vedette des Éternels. Une première pour un film Marvel depuis Ang Lee (et son Hulk, si injustement mésestimé). Rencontre à l'occasion de sa visite parisienne.
Les Éternels propose à la fois une continuité de l'univers Marvel et le développement d'une nouvelle mythologie. Comment avez-vous trouvé l'équilibre entre ce que vous vouliez apporter de nouveau et ce qui était déjà installé ?
Chloé Zhao : Le film se déroule immédiatement après le moment où la moitié de la population revient sur Terre. Pour moi, c'est un événement écologique très important. C'est extraordinaire d'avoir une histoire qui se passe à ce moment, et l'influence que ça a sur notre planète. Sachant cela et que nous allions explorer l'origine de l'univers cinématographique de Marvel (et que ça aurait des répercussions sur le futur), j'ai été très encouragée à faire un film un peu “unique“, sans imaginer Nick Fury au milieu. On m'a dit : « non non, ce sont de nouveaux personnages, c'est une nouvelle histoire »
Vous revendiquez, parmi vos influences, celles issues du manga, et votre désir de combiner les cultures de l'Occident et de l'Orient. Comment avez-vous fait ?
Le manga a été une grande partie de ma vie ! Dans le manga, les personnages se prennent vraiment au sérieux alors que quelque chose de ridicule va se passer... et tout se mélange. Ça, je l'ai un peu emmené avec moi dans ma manière de filmer et dans l'action.
Quid de votre rapport au western, à nouveau présent ici ?
Si je peux être tout à fait honnête, j'avais peut être regardé trois ou quatre westerns avant de faire The Rider et puis les gens m'ont dit que je travaillais dans ce genre. Donc je me suis mise à l'étudier parce que je n'avais pas grandi avec ces films. Et puis récemment, j'ai vu pour première fois My Darling Clementine. Ça m'a vraiment éblouie ; il y tellement tellement à découvrir... Néanmoins, la raison pour laquelle les western et né vient de notre curiosité vis-à-vis de ce qu'il y a au-delà de l'horizon ? Allons découvrir ! Et donc c'est comme ça que ce genre et né. Et je trouve aujourd'hui que dans le dans le genre de la science-fiction et des super héros, on commence à se poser la question, qu'est-ce qu'il y a en haut dans les cieux ? Quelle est notre relation à la technologie, quel est le sens de l'existence humaine ? Qu'est-ce qu'il y a au fond des des des des océans ?Donc je me trouve vraiment attiré par des genres qui explorent et qui parlent de cette angoisse collective en tant qu'humains. Quand je fais des films dans ces genres-là, ça m'aide aussi à justement traiter et gérer ma propre angoisse de se dire : « où on va ? »
Jusqu'à présent dans votre cinéma, vos personnages étaient confrontés à des problématiques de fin du mois. Ici, ils sont confrontés à la fin du monde. Qu'est-ce que cela induit comme changement de perspectives et philosophiques ?
Je n'y avais pas pas pensé de cette façon, merci de le mentionner. Je pense qu'on se place dans le feu pour pouvoir renaître. On se met d'énormes obstacles pour pouvoir apprendre un peu plus sur qui nous hommes. Dans les petits films indépendants que j'ai faits, j'ai toujours installé mes personnages dans des tragédies incroyable pour que justement, ils puissent renaître. Et dans cette histoire, il y a tout un peuple : c'est l'humanité... On espère vraiment, qu'au travers de cette histoire, on réfléchira à ce qui est important dans notre relation à la planète et entre nous-mêmes.
Justement, comment avez-vous opéré la transition entre un film indépendant comme Nomadland et Les Éternels produit par un studio ?
Je ne sais pas comment faire autrement que faire les choses avec mes tripes ! Chaque chaque décision que je prends, la relation avec les gens avec lesquels je travaille, ma relation avec le casting, avec la caméra, c'est toujours quelque chose que je dois ressentir de l'intéressé. Si je ne le ressens pas, je ne vais même pas me réveiller le matin pour aller sur le tournage. Pour moi, c'est la même chose, parce que ça vient du même endroit. Les Studios Marvel, à la surprise de beaucoup de personnes, sont très différents des autres studios traditionnels de Hollywood. Il y a très peu de personnes qui sont responsables — que trois. Et moi je ne parlais qu'a deux personnes pour prendre toutes les décisions. Ils ont vraiment créé une bulle pour moi, pour que je puisse vraiment travailler de manière très sécurisée. Ils m'ont laissé voler, mais bon il m'auraient rattrapé si je tombais, donc je me sentais en sécurité.
Les musiques additionnelles tranchent avec celles habituellement entendues dans les films Marvel. Est-ce vous qui les avez-vous choisies ?
C'est un ensemble très éclectique et j'en suis tout à fait responsable : cela représente un peu la personne étrange que je suis ! Parce que ces chansons — Pink Floyd, BTS, The Foreigners, etc. — c'est toute la musique que j'aime. C'est aussi simple que ça. Time de Pink Floyd était là vraiment à juste titre. Pink Floyd n'apparaît pas souvent dans les films parce que les droits sont très très cher, c'est presque impossible. Mais je voulais une chanson que tout le monde puisse comprendre, qui soit globale, quelle que soit la culture des gens. Tout le monde écoute et cette chanson est très populaire, très universelle. Les paroles, les instruments, franchement, ça ne pouvait pas être mieux : il fallait vraiment qu'on y aille !