De Christian Vincent (Fr, h35) avec Catherine Frot, Arthur Dupont, Jean D'Ormesson...
Du fin fond de l'Antarctique où elle a trouvé refuge pour faire le point sur une aventure exaltante mais achevée brutalement, Hortense Laborie se souvient des deux années passées au palais de l'Élysée où celle qui, jusqu'ici, ne tenait qu'une modeste auberge périgourdine est devenue la cuisinière personnelle du président en place. Derrière le personnage de fiction se cache l'authentique chef des cuisines privées de François Mitterrand à la fin de son deuxième septennat. Christian Vincent a choisi d'être beaucoup plus abstrait pour faire de cette histoire vraie une fable sur le pouvoir et la fin d'une époque. Élégamment raconté par une caméra toujours en mouvement, parfaitement interprété par une Catherine Frot aussi à l'aise dans la légèreté que dans la gravité, Les Saveurs du palais est le prototype du film qualité française, label vintage ici remis au goût du jour. Or, Laborie est elle-même une sorte de madone du terroir et des recettes de «mémé», tandis que le président, fin lettré (normal, l'incunable Jean D'Ormesson en endosse avec une délectation non feinte le costume), se lamente sur l'air du «On ne parle plus comme ça, maintenant». Désagréable sensation d'un film qui accorde sa forme et son fond sur un égal niveau de conservatisme, repli identitaire qui a beau se donner tous les atours de la malice, se résume en fin de compte à un assez rance "C'était mieux avant".
Christophe Chabert