De Jalil Lespert (Fr, 1h40) avec Pierre Niney, Guillaume Gallienne, Charlotte Le Bon...
Énième bio filmée d'une figure patrimoniale et contemporaine de l'Hexagone, ce Yves Saint Laurent en accumule les défauts jusqu'au désastre intégral. Dès le premier plan sur Pierre Niney en YSL, avec faux nez et diction maniérée, le carnaval façon Patrick Sébastien commence ; le comédien imite mais n'interprète jamais son modèle, dans une quête de réalisme vaine car elle ne fait qu'en souligner les artifices. Idem pour le pénible défilé qui consiste à présenter chaque personnalité célèbre par son nom et son prénom dès son entrée en scène — seul un faux Andy Warhol perruqué et gesticulant en prenant des photos n'aura droit qu'à un cameo muet et anonyme —, convention de mauvais scénariste raccord avec un dialogue qui accumule les grandes sentences et nie toute quotidienneté aux personnages.
Le film baigne ainsi dans une imagerie de reconstitution paresseuse, clichés visuels d'un côté — l'Algérie coloniale, les clubs de jazz — anachronismes ridicules de l'autre — le défilé de 1971 sur de l'électro-pop ! Même la narration est bâclée, notamment l'intro qui hésite entre chronologie et flashback méditatif avec voix-off, sans parler d'une fin qui accélère les événements pour tenir dans un format prime time.
Enfin, Lespert ne semble avoir aucun point de vue sur Yves Saint Laurent lui-même, se contentant de lancer des idées — la maniaco-dépression, l'addiction au travail puis à la drogue, le manque de confiance en lui, l'opportunisme marchand, l'équilibre amoureux et professionnel qui le lie à Pierre Bergé — sans jamais les développer ou les faire tenir ensemble. La nullité absolue du résultat laisse en tout cas un boulevard à Bertrand Bonello pour son Saint Laurent attendu du côté de la croisette en mai prochain...
Christophe Chabert