Théâtre / «Dès que nous naissons, nous pleurons d'être venus sur ce grand théâtre de fous». De cette phrase extraite du "Roi Lear", le jeune metteur en scène Benjamin Forel a fait sa devise pour mener à bien un triple projet autour de William Shakespeare. La pièce maîtresse, à l'origine de ce travail, est «Mesure pour mesure» qui traite du désir et d'une prétendue morale sexuelle. La deuxième est plus politique : «Edouard II». À priori plus léger, le troisième volet de cette fresque (et premier des trois spectacles présenté au public) est "Les Sonnets ou le portrait de Mr W.S". Cette petite forme se révèle in fine être plus qu'une simple mise en bouche. C'est une invitation à découvrir une partie de l'œuvre de Shakespeare quelque peu oubliée. Le dramaturge développe longuement sur l'amour s'adressant à un homme puis à une femme avec lyrisme et romantisme, loin des histoires de vengeances et d'affrontements qui font le sel de ses grandes pièces. La troupe du Levant restitue sur scène un atelier d'artistes où de jeunes comédiens apprennent l'art du jeu. Quand certains s'entraînent à la technique de la claque ou de la bagarre en fond de scène, d'autres tentent de déclamer quelques tirades de "Roméo et Juliette" sous l'œil acerbe du jeune William. Ce spectacle très généreux d'une heure (et qui pourrait aisément durer plus) prend aussi souvent les spectateurs à partie en les incitant à lire quelques lignes des Sonnets. Jamais démagogique, ce procédé est au contraire un moyen de revenir à la source du théâtre, à l'amour des mots et du langage.
Nadja Pobel"
Les Sonnets ou le portrait de Mr W.S", au Théâtre des Marronniers, jusqu'au lundi 15 novembre.