Théâtre / Finement mené et écrit, le travail de François Hien interroge. Pourquoi ne pas choisir un point de vue tranché et prendre pour appui un fait divers si symbolique ? Immersion au procès d'un infirmier qui a mis fin à la vie d'un malade dans un état végétatif sur fond de guerre familiale.
Olivier Masson doit-il mourir ? est très largement inspiré par l'Affaire Lambert, du nom de ce jeune homme qui a fini par décéder cet été à la suite de l'arrêt des soins, épilogue d'une bataille juridique et familiale acharnée. Le co-metteur en scène (avec toute la distribution), acteur et auteur de ce texte, François Hien s'est servi de ce canevas pour ensuite s'en détacher et interroger les arguments des uns et des autres quant au décès programmé ou au maintien en vie de ce patient en état pauci-relationnel. Est-il conscient ? Souffre-t-il ? Qu'aurait-il souhaité s'il se retrouvait dans cette situation ? À son épouse, infirmière comme lui, il avait déjà confié ne pas vouloir vivre ainsi. Dans une première partie très rapide, chacun expose ses arguments, les cinq acteurs endossant les costumes des avocats, du juge, de la mère, de l'épouse, des médecins, chefs de service... Car il s'agit de faire le procès d'Avram Leca, soignant qui, seul, après l'avoir veillé des années, a décidé de débrancher le malade sans autorisation. Devant la complexité et la multiplicité des personnages, c'est une performance d'écriture que tout apparaisse aussi clairement. Quand ce tourbillon devient trop dense, le théâtre surgit dans ce qui est l'acmé de ce travail : figurer la chambre par un simple rideau à demi ouvert et entendre l'épouse expliquer à son aimé la folie de cette situation et les passions qu'elle suscite.
Etretat
Cela aurait suffit. Les nuances de réflexions qui ont traversé cette femme — et dont elle fait récit ici — au cours de ces mois de souffrance sont la matrice d'un potentiel travail pouvant interroger ce qu'est l'euthanasie plus encore qu'avec la présence de la mère, « catholique intégrale » et non « intégriste » comme il est dit pour sa défense et qui se trouve des éléments bancals pour expliquer ce soudain rapprochement avec son fils, ou sa « carcasse ». Cette égale mise à niveau ne sert pas ce propos pourtant fort intéressant et restitué, avec foi, par les seuls outils du théâtre, sans béquille vidéo. Mais, à ne pas choisir sa vérité (et inventer un épilogue plus qu'étrange), Olivier Masson doit-il mourir ? laisse au milieu du gué.
Olivier Masson doit-il mourir ?
Aux Célestins jusqu'au samedi 25 janvier