Arts visuels, philosophie, littérature... Sous la houlette de Gwilerm Perthuis et dans le sillage de l'idée de montage chère à Walter Benjamin, la revue Hippocampe brasse large. Embrasse beaucoup, bien étreint. Ses numéros proposent alternativement une thématique générale et une thématique géographique. Le sixième consacré à la Catalogne n'avait, a priori, rien de très excitant. Mais comme ce fut déjà le cas pour la Nouvelle-Zélande, la revue aux tonalités catalanes nous surprend encore par la diversité des angles de vue, l'originalité et la qualité de la plupart des articles. On y croise George Orwell à l'engagement relu par Roger Dadoun, le photographe irrévérencieux Joan Fontcuberta, un portrait littéraire de Salvador Dali par Josep Pla, un texte inédit de l'écrivain espagnol Enrique Vila-Matas... Et aussi une passionnante interview, longue et fouillée, de l'artiste Jordi Colomer dont on avait pu découvrir le travail dans une superbe exposition monographique à l'Institut d'Art Contemporain. En marge de la thématique catalane et toujours dans le domaine des arts plastiques, la revue ouvre un espace aux dessins de Karine Hoffman représentant quelques paysages fragmentaires et désolés. Le romancier Jean-Claude Hauc signe, lui, un petit essai passionnant sur les rapports de Georges Bataille à la nudité, entre jouissance, savoir et mort, tout en évoquant des œuvres de Hans Baldung Grien ou Edward Munch. Bataille qui écrit : «J'ai dans la tête un vent violent. Écrire est partir ailleurs». Ce numéro d'Hippocampe souffle un bon coup de tramontane en l'occurrence.
Jean-Emmanuel Denave
Hippocampe, «Catalogne», No6