Nino d'Introna et l'auteur Stéphane Jaubertie, déjà complices sur les brillants Jojo au bord du monde et (surtout) Yaël Tautavel, devaient se retrouver au sommet de l'Everest, à 8848 mètres d'altitude, pour sceller leurs retrouvailles artistiques. Le résultat, qui porte précisément le nom du plus haut pic du monde, n'atteint malheureusement pas ces hauteurs fulgurantes. Pourtant, toutes les conditions semblaient réunies, à commencer par un comédien central épatant : Cédric Marchal, déjà vu dans Yaël, qui occupe tout l'espace. Il incarne un enfant qui vient de manger par inadvertance son père devenu aussi petit qu'une cerise. Une fois recraché, celui-ci aspire à grandir en dévorant les principaux ouvrages de la littérature car, dit-il, «la réalité est dans les livres». Le même sort sera ensuite réservé à la mère, entre temps partie avec le voisin antiquaire. En explorant de façon surréaliste voire dadaïste l'enfance livrée à elle-même, la déresponsabilisation des adultes, leurs dichotomies presque caricaturales (un père lunaire, une mère pragmatique), D'Introna et Jaubertie s'attaquent à un thème majeur mais presque trop touffu pour être contenu en une heure. De même qu'au plateau, tout ce qui est tenté l'est avec succès mais se heurte parfois à un trop-plein : des ombres chinoises, des marionnettes, du jeu en grande partie en style indirect... Le spectacle y perd en fluidité ce qu'il gagne en audace.
Nadja Pobel
Everest
au TNG, jusqu'au mardi 19 février