Là-balte si j’y suis / de Šarūnas Bartas (Lit-Fr-Ukr-Pol, 2h) avec Mantas Janciauskas, Lyja Maknaviciute, Andrzej Chyra, Vanessa Paradis...
Pour dépanner un ami, Rokas et Inga acceptent de convoyer une camionnette humanitaire de Lituanie en Ukraine. Sauf que la zone n'est pas si facile d'accès en période de guerre — une guerre dont Rokas n'avait même pas idée, et qui intrigue ce jeune homme sans but...
Cinéaste du politique, voire du géopolitique, Bartas ne pouvait rester insensible à la situation ukrainienne et au chaos qu'elle produit. Un chaos mâtiné d'incertitudes et de danger, conforme à l'ambiance inquiétante de ses premiers films, explorant par la contemplation le flou des frontières et de l'attente. Pourtant, c'est par une structure des plus linéaires que Bartas engage son récit : il faut que ses deux protagonistes se perdent, littéralement ; qu'ils éprouvent la réalité de la guerre en discutant avec des “humanitaires” pour qu'ils se trouvent — ou du moins parviennent à orienter leur boussole intérieure.
La curiosité de Rokas, cette irrépressible pulsion le menant au plus près du danger — histoire d'en apprécier la réalité mais aussi de tester le hasard — rappelle la démarche de John Locke, héros de Profession : Reporter (1975) d'Antonioni dans son illusoire quête de liberté, tendant l'élastique jusqu'au point de rupture, découvrant un sens à sa vie au moment où elle risque de lui échapper.