Films sortis en salles la semaine du 9 août 2023

Films sortis en salles la semaine du 9 août 2023

À voir

★★★☆☆ Zone(s) de turbulence 

Afin de partir en vacances au Cap-Vert avec son compagnon, la Londonienne Sarah a suivi en secret un stage destiné à vaincre sa phobie de l'avion. La dernière épreuve consiste à s'envoler pour l'Islande avec un groupe d'autres angoissés. Hélas, rien ne va se passer comme prévu. Cela va être même bien pire !

Voici le genre de petite comédie rafraîchissante calibrée pour l'été (Londres sous la pluie, Islande sous la neige) que vous ne risquez pas de voir si vous prenez l'avion — on sait depuis Rain Man que tout film évoquant des problèmes aériens est banni des longs courriers. Dommage, car il pourrait détendre les stressés et leur enseigner des trucs... OK, à conditions qu'ils voyagent en business, comme les protagonistes de ce film aux rebonds aussi foutraques que surprenants. Derrière le décollage-décalage, il est question du stress post-traumatique des anciens militaires, de consentement, de refoulement sexuel, de famille recomposée et du hiatus entre image sociale et for intérieur. Bon point supplémentaire : le recours à des visages peu connus du grand écran, telle Lydia Leonard. Certes, il y a Timothy Spall, mais celui-ci a tellement changé ces dernières années qu'il est désormais presque méconnaissable !

De Hafsteinn Gunnar Sigurðsson (Isl.-G.-B., All., 1h37) avec Lydia Leonard, Timothy Spall, Emun Elliott, Ella Rumpf...


★★★☆☆Les Avantages de voyager en train 

La surprise de la semaine vient de l'autre côté des Pyrénées mais aura mis du temps à les franchir. Elle révèle un cinéaste doué, notamment pour rendre captivante et compréhensible une histoire remplie d'histoires concentriques. Prenez un siège...

Rentrant chez elle en train après avoir placé son époux dans une clinique psychiatrique, Helga est abordée par son compagnon de voyage. Se présentant comme le Dr Angel Sanagustín, il raconte à cette éditrice madrilène abasourdie une série de cas atypiques l'ayant personnellement touché. De quoi la propulser à son tour dans sa propre histoire...

Avec sa voix off, ses inserts cut et ses plans joliment centrés, à la direction artistique ostensiblement soignée, Les Avantages de voyager en train évoque de prime abord un amalgame entre le Ritchie de Snatch, le Jeunet de... presque tout Jeunet, voire Wes Anderson puisqu'il y a également un chapitrale. L'impression se densifie concernant Jeunet lorsque le film déroule son programme : raconter une farandoles d'anecdotes singulières touchant des gens de toutes sortes, plus ou moins liés par la destinée, dans des décors et époques différents. Déjà vu ? Oui et non, car Aritz Moreno investit ici avec méthode une “profondeur narrative” là où beaucoup dévident des saynètes dans la linéarité, façon courts métrages. Reprenant le concept du récit-cadre (à l'instar du Manuscrit trouvé à Saragosse, pour faire couleur locale, ou d'Inception pour faire plus “cinéma”), le réalisateur crée ici un hallucinant système d'emboîtement d'histoires qui jamais n'égare le spectateur — voilà pour l'intrigue. Adroit dans son énonciation, il se montre aussi un habile théoricien, multipliant les allusions à la structure globale de son œuvre, volontiers explicite (mention des oignons, des poupées russes...), ou par des jeux sur les répétitions, les contenants et les contenus...

Film policier, comédie noire parfois gore, film sur les névroses et psychoses (dont le complotisme)... Les Avantages de voyager en train ne cesse de surprendre par sa capacité à se réinventer comme par la largeur du périmètre qu'il couvre, sans pour autant jouer l'épate. Pour son premier long métrage, Aritz Moreno compose donc une belle réussite doté d'une distribution de choix, peuplée de visages connus des deux côtés des Pyrénées. Dont Gilbert Melki ou Quim Gutiérrez que l'on ici retrouve en despote domestique après L'Île rouge — ou plutôt avant, puisque ce film date de... 2019 ! À croire qu'il aura fallu que la Renfe débute son exploitation ferroviaire en France pour qu'on puisse monter à bord de ce bolide prometteur.

De Aritz Moreno (Esp.-Fr., 1h43) avec Luis Tosar, Pilar Castro, Ernesto Alterio...

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