Baroque mais pas que / La Chapelle de la trinité est de retour à partir du 30 novembre prochain, pilotée par une nouvelle équipe qui a présenté une programmation pour le moins surprenante.
La conférence de presse a eu lieu le 4 octobre dernier, et le week-end d'ouverture débutera le samedi 30 novembre prochain. Mieux vaut tard que jamais, Le Petit Bulletin vous évoque le renouveau du projet avant le top départ de cette première saison.
Située dans le 2e arrondissement de Lyon, la chapelle du 17e siècle qui se distingue par son décor raffiné en marbre de Carrare fait briller les yeux de plus d'un amateur de musique baroque. Jouissant d'une acoustique très particulière, l'édifice est parfait pour accueillir des concerts d'instruments anciens.
Pourtant, elle n'a été rénovée que tardivement, suite à la première élection de Michel Noir à la mairie de Lyon en 1989. Désacralisée à la Révolution, l'édifice a servi de gymnase, d'entrepôt, de marché aux skis, puis de foire aux tapis, s'y est même tenue une exposition sur les reptiles.
Les travaux auront duré dix ans, avant que l'édifice ne soit confié à Eric Desnoues et son association Les Grands concerts. Celui-ci est resté 24 ans à sa tête, puis la Ville et la Métropole de Lyon ont conjointement décidé en de publier un appel à manifestation d'intérêt en janvier dernier, remporté par deux autres acteurs du baroque sur le territoire, Les concerts de l'Hostel Dieu ainsi que Superspectives.
Une passage de relais difficile
Le Petit Bulletin l'avait déjà médiatisé à l'époque, le précédent occupant de la Chapelle de la Trinité n'a ni souhaité, ni compris le désir de renouvellement des équipes. Tant et si bien qu'il est parti avec tout le mobiliser (du matériel de sécurité incendie aux cuvettes de toilettes). De plus, Les Grands concerts a déposé une requête auprès du Tribunal Administratif de Lyon, demandant l'annulation de la Convention de la mise à disposition de la Chapelle de la Trinité. Le Tribunal devrait rendre sa décision d'ici quelques mois.
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Renouveau
Il y a des poncifs qu'il est bon de s'épargner, parmi lesquels « entre tradition et modernité » ou « entre rupture et continuité ». Pourtant ceux-ci correspondent au renouveau de la Chapelle de la Trinité, renommée sobrement "La Trinité, nouvelle scène de musiques baroques et irrégulières". En témoigne la nouvelle identité graphique du lieu — réalisée par l'atelier Soleil soleil — à la fois conceptuelle et épurée (du rose pétant, de l'orange flashy, et puis c'est tout).
Avec Camille Chabanon (Les Concerts de l'Hostel Dieu) et Camille Rhonat (Superspectives) à la codirection du projet, accompagnés par les deux artistes internationaux Franck-Emmanuel Comte à la direction artistique (Les Concerts de l'Hostel Dieu) et François Mardirossian (Superspectives) comme conseiller artistique, l'équipe a de quoi en imposer.
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« Ni moderne et clivant, ni ancien et clivé, nous assumons une certaine prise de risque en traitant sur le même plan musiques de création et musiques patrimoniales », a d'ailleurs déclaré le professeur de philosophie Camille Rhonat lors de la conférence de presse. Un discours repris par son homonyme Camille Chabanon qui a évoqué les trois piliers du nouveau projet : faire de la Chapelle de la Trinité « une maison du baroque au sens le plus académique qui soit, un laboratoire de nouvelles pratiques créatives et un lieu d'hospitalité culturelle ».
Un leitmotiv qui résonnera durant les trois ‘'temps forts'' de la saison : le week-end d'ouverture, le festival Synth chapelle (oui, il fallait oser) et le festival Chapelle sauvage. Une programmation qui ne cessera d'ailleurs de graviter autour de l'œuvre de Jean-Sébastien Bach.
La Chapelle de la Trinité sort les platines
Une fois les présentations faîtes, la démarche expliquée, ce sont les partis pris esthétiques de la programmation qui surprennent. On peut penser à la réinterprétation avec instruments anciens de l'œuvre de l'Islandaise avant-gardiste Björk par Le SoNart (le dimanche 12 janvier) mais aussi une majeure partie de la programmation du festival Synth chapelle (les 22 et 23 février) où la pop, le noise (musique bruitiste) et l'électro flirteront sans retenue avec des répertoires plus classiques. On pense au dernier concert du samedi 22 février, où Sarah Terral offrira à entendre ses propositions « entre doux et dur, où les oiseaux écoutent de la noise et les tôles industrielles chantent en italien », mais aussi le b2b du dimanche 23 février où notre foisonnant artiste électro lyonnais Arandel « transmogrifiera » Jean-Sébastien Bach en compagnie de Camille Rhonat. Jonathan Fitoussi clôturera la soirée avec une réinterprétation aux synthétiseurs de la première symphonie de Gustav Mahler, connue sous le nom de Titan. Des partis pris courageux dans cette chapelle désacralisée qui ne s'était jusque-là pas aventurée dans autant de "cuisine fusion".
Cependant, — et c'est là qu'on retrouve toute la continuité du projet — de nombreux concerts 100% baroques sont prévus ; parmi lesquels Les Concertos Brandebourgeois (Bach encore, le vendredi 21 mars) interprétés par Les Folies françoises, Mes amours durent en tout temps (chansons de la Renaissance, mardi 8 avril) par l'ensemble Près de votre oreille ou encore Le paradis perdu (œuvres baroques inspirées par Milton, le mardi 15 avril) par l'Helsinki Baroque Orchestra.
Le dernier temps fort de l'année, Chapelle sauvage (les 10 et 11 mai 2025), peut sembler un peu plus sage dans sa programmation. Que nenni ! Consacré à l'œuvre Les 4 saisons d'Antonio Vivaldi (qui fête son 300e anniversaire) la chapelle accueillera notamment une volière imaginaire (et un orgue miniature) : installation sonore de Clément Vercelletto ; mais aussi une performance de cirque aérien (Anne-Claire Gonard), accompagnée par une harpe, celle de Constance Luzzati.
La Trinité
Du 30 novembre 2024 au 26 juin 2025 à la Chapelle de la Trinité (Lyon 1er) ; prix variables