Théâtre / Retour sur la vie d'un tueur fou dans Les Événements, pièce du dramaturge contemporain écossais David Greig. Si Romane Bohringer s'y épanouit, le spectacle manque de fluidité.
À 48 ans, David Greig est un auteur reconnu par ses pairs, passé par la Royal Shakespeare Company ou le Royal Court de Londres. Avec Lune jaune, la ballade de Leila et Lee, il racontait avec onirisme la réalité crue de deux ados paumés, profondément touchants, laissés sur le bas-côté par une société britannique trop sèche pour entourer ses enfants. Baptiste Guitton, au TNP en 2014, en avait fait une adaptation stylisée et déjà en musique. Car David Greig aime adjoindre à son travail des chansons (comme les dix chanteurs de gospel de sa version des Bacchantes).
Avec Les Événements, son dernier texte en date (créé dans le cadre du festival RING de Nancy il y a tout juste un an par Ramin Gray) il donne même la moitié du temps de jeu ou presque à une chorale qui, chaque soir, change. Romane Bohringer est pasteur, chef de chœur, rescapée d'une tuerie perpétrée par l'un de ses élèves. Lointainement inspirée de l'acte terroriste d'Anders Behring Breivik en Norvège, cette pièce progresse par saccades. Si l'actrice ne joue qu'un seul rôle, son partenaire (le fantastique Matthieu Sampeur, déjà impeccable dans La Mouette d'Ostermeier) endosse les costumes de l'assassin mais aussi de son père - un homme politique d'extrême-droite, de la petite amie de Claire, d'un animal même, le temps de quelques secondes. Et la chorale d'être partie prenante de ce déroulement...
Désaccordé
Si cette idée de mixer le jeu et le chant est pertinente dans son énoncé, sur le plateau, c'est une autre histoire. Car, avec un texte haché menu, bien plus suggestif que concret, difficile de se permettre une telle différence de jeu. Briefés seulement deux heures avant leur entrée en scène, les membres de la chorale n'interviennent pas seulement en chantant mais aussi en donnant la réplique aux comédiens. Et la générosité, même mêlée à de solides répétitions des chansons, ne peut pas tout.
Ce fonctionnement induit des ruptures de rythme ou pire, parfois, des "tunnels" qui entravent la narration et la force d'un propos qui n'en manque pourtant pas. Dans les derniers instants, Romane Bohringer (Claire) fait face à ce meurtrier qu'elle tente de percer à jour. « Pourquoi ? » lui demande-t-elle. Mais ce supposé acmé n'a pas la force dramatique escomptée.
Et de nous remémorer une autre pièce sur un fait divers tragique, 20-Novembre de Lars Noren, dans une mise en scène - et une scénographie - sobres mais implacables de Simon Delétang.
Les Événements
Aux Célestins jusqu'au 27 mai