On croyait Eric Powell du genre à ne fréquenter que des conventions de nerds casse-bonbons. On se trompait : le créateur du Goon, personnage parmi les plus cultes de la BD américaine contemporaine, est attendu cette semaine à la librairie Comics Zone et chez Expérience.Benjamin Mialot
Nous vous l'annoncions la semaine dernière : l'événement BD de la rentrée est la venue, lundi 16 septembre à La BD et le lendemain chez Expérience, de Julie Maroh, la trop peu créditée auteur de Le Bleu est une couleur chaude, juste et pathétique romance saphique qui a servi de matière première à la palmée Vie d'Adele d'Abdellatif Kechiche, à l'occasion de la parution de son nouvel ouvrage, le très fauviste Skandalon, dans lequel elle décortique avec une férocité jubilatoire les mécanismes de starification – on appréciera l'ironie de la situation - via la descente aux enfers d'une rock star. Mais c'était avant qu'une chafouine notification Facebook ne nous invite à prendre part au véritable événement BD de la rentrée : la dédicace, encore chez Expérience (lundi 16 septembre), puis chez Comics Zone (le 17), d'Eric Powell.
La bagarre !
Ce nom ne vous évoque sans doute qu'une lointaine affaire d'armes de destructions massives invisibles. Il est en réalité celui d'une petite institution de la bande-dessinée d'Outre-Atlantique, depuis que ce jovial autodidacte du Tennessee a créé, au tournant des années 2000, The Goon (d'un terme d'argot canadien désignant un hockeyeur cherchant la confrontation physique), une série narrant la lutte pour le contrôle d'une ville portuaire malfamée d'une brute épaisse au visage horriblement balafré et de son meilleur pote, un nabot psychopathe et alcoolique, contre un gang de zombies.
L'affaire était pourtant loin d'être entendue : tranchant radicalement, tel un improbable mix entre le Savage Dragon de Erik Larsen (pour la violence over the top et l'humour rentre-dedans) et le Hellboy de Mike Mignola (pour l'inspiration bis et la virtuosité graphique), avec le sérieux de l'industrie des comics post-11 Septembre, The Goon a un temps végété dans les limbes de l'auto-édition. Flairé par la maison Dark Horse (qui publie justement Hellboy), Powell a depuis glané pas moins de six Eisner Awards et vu ses créations secondaires, notamment Chimichanga, titre jeunesse hyper régressif dans lequel une fillette à barbe tente de sauver son cirque de pauvres freaks en adoptant un monstre aussi bête que vorace, être accueillies comme autant d'objets cultes.
Ce qui ne l'empêche pas, liberté de ton oblige, de rester un outcast : l'adaptation en film d'animation de The Goon, à laquelle est tout de même associée David Fincher, n'a trouvé aucun preneur et a dû être financée par une campagne de crowdfunding.
Eric Powell
A Expérience, lundi 16 septembre
A Comics Zone, mardi 17 septembre