Livraisons , premier festival de la revue à Lyon, se veut ouvert aux anciens comme aux modernes et promet deux belles journées de rencontres et de débats autour de cet "objet" en papier inoxydable.Jean-Emmanuel Denave
Pour bien voir, il faut peut-être voir deux fois... C'est ce que suggère l'étymologie du terme "revue". Comme si l'actualité, la pensée, la création exigeaient, à travers ce terme et cet objet, de pouvoir s'inscrire dans un temps, un format, un "lieu" particuliers. Et ce malgré les annonces incessantes de la mort du papier.
«La revue est un type de publication mal identifié. Trop souvent, elle est considérée, à tort, comme un objet difficile, obscure, élitiste... Ces préjugés sont couplés à un problème de définition : la majorité des lecteurs confondent les revues avec les magazines ou les journaux et ne soupçonnent pas, la plupart du temps, l'extraordinaire diversité que ce médium recouvre. L'enjeu principal du festival Livraisons est justement de désamorcer les a priori en valorisant le rôle joué par les revues dans la diffusion du savoir et des idées et en démontrant qu'elles sont un terreau essentiel à la création plastique ou littéraire.»
déclarent dans un entretien Gwilherm Perthuis et Paul Ruellan.
S'appuyant sur l'association du même nom (créée en 2014, Livraisons réunit des acteurs du monde du livre pour défendre les revues en Rhône-Alpes), les deux jeunes hommes lancent cette semaine le premier festival de la revue à Lyon.
Idées, musique, poésie...
Livraisons vise donc à dédramatiser et à démocratiser le rapport des lecteurs à la revue. Pour cela, les organisateurs ont invité des revues de tous types – de grands "classiques" comme Europe et Esprit à de jeunes revues comme Le Pigeon ou TACET, revue musicale expérimentale – et pour certaines numériques. Et conçu une programmation dense et variée qui se déroulera pour l'essentiel à l'École Nationale Supérieure des Beaux-Arts – qui publie depuis quelques temps une passionnante revue, Initiales, qui "cartographie" à chacun de ses numéros l'univers d'un écrivain ou d'un artiste : John Baldessari, Marguerite Duras, Andrea Fraser...
De là, Livraisons se décline en un entrecroisement de tables-rondes, de dialogues et de cartes blanches qui pourront donner lieu à des performances, des projections, des moments musicaux...
Une place particulière, et nous nous en réjouissons, est ainsi consacrée à la poésie, avec la rencontre entre la revue marseillaise Il Particolare et la revue bordelaise L'Affiche, revue murale de poésie qui, après avoir pratiqué l'affichage dans des abribus ou des lieux culturels, est devenue une publication où chaque numéro est conçu comme une œuvre en soi. Et avec la soirée inaugurale en hommage à l'historique L'Éphémère, revue d'art et de poésie fondée en 1967 par les poètes Jacques Dupin, André du Bouchet et Yves Bonnefoy – elle a ensuite accueilli Michel Leiris ou Paul Celan. Une belle entrée en matière pour un festival prometteur !
Livraisons, festival de la revue
Au Musée des Beaux-Arts et à l'École des Beaux-Arts du jeudi 4 au samedi 6 juin