Manger / Une enclave portugaise nichée au fin fond du septième. Discrète comme une fadista muette, courue des familles comme une pâtisserie de Belem. On réserve.Stéphanie Lopez
Quand on pense cuisine portugaise, on pense tout de suite morue, huile d'olive et autres chairs roboratives promptes à caler des hordes de Cristiano Ronaldo. Alors, bien sûr, quand on pousse la porte de cette cantine sous-titrée «restaurante tipico», on s'attend à trouver de la bacalhau sous toutes les coutures : séchée, frite, braisée, compactée en acras ou même gratinée... Et on se dit tant pis pour l'amateur de gros steaks — qui n'aura qu'à aller se faire voir chez les grecs. Tout faux. Déjà, les jambons séchés qui pendent près du bar rassureront les carnivores : ici, les plats du jour se déclinent systématiquement en un choix de trois poissons et trois viandes — et plutôt que d'opter pour les travers de porc, on ne saurait que trop recommander le cochon de lait ou le chevreau rôti, des spécialités qui rappellent que le Portugal possède aussi un riche terroir "côté terre". Côté vignes itou d'ailleurs, car la carte des vins s'étend bien au-delà de Porto. Notre poulpe grillé (aux portions tentaculaires) s'est fort bien accommodé du fameux vin vert, un blanc frétillant qui se boit comme une limonade.
Ni fado, ni fadasse
Certes, il vaut mieux aimer l'ail et les ambiances familiales lorsqu'on prend place devant sa marmite de riz aux fruits de mer, encerclé par des tables de quinze couverts (le dimanche, toute la communauté lusitanienne semble s'être donnée rendez-vous sous une montagne d'acras et de moules à la crème). Il vaut mieux aussi garder une place pour le dessert, car sur ce point les chefs Michel Leitao et Luis Luizes ne mégotent pas avec l'institution de la pastelaria : les gâteaux sont goûteux, généreux, et leur bolo de bolacha (une base de génoise imbibée de thé, puis engloutie sous une tonne de crème fouettée) n'a rien à envier aux meilleurs tiramisus. Et si le cadre n'a pas le charme d'une vieille tasca nichée dans les ruelles de l'Alfama, reste que le poulpe «cuit à la Chef Luizes» vaut bien son pesant de pittoresque. Pour une dizaine d'euros le plat principal, autant dire qu'O Cantinho constitue une excellente escale... qui dépayse et qui cale.
O cantinho de Portugal
25 rue Saint-Jérôme, Lyon 7e (04 72 73 22 69)
Plats de 10€ à 13, 50 €