Premier temps fort de l'année, «Le boom des années 1980» nous invite, pendant trois semaines et neuf spectacles, à nous replonger dans une bouillonnante et trépidante période de la danse hexagonale.Jean-Emmanuel Denave
«La nouvelle danse française», puisque c'est ainsi que les historiens nomment le courant chorégraphique né à l'époque, fut caractérisée par les spécificités suivantes : «Un goût pour le petit geste, le détail, la sophistication, plus que pour l'exploit... Le développement des scénographies de plus en plus importantes marque une tendance à représenter des espaces clos, ou denses, plutôt que des étendues illimitées. Il indique aussi que la danse française hérite d'une tradition théâtrale riche. C'est peut-être ce dernier trait qui détermine une identité française : le mouvement ne sert pas à se déplacer à travers l'espace, mais s'offre plutôt en miroir à l'intériorité du danseur » (in La Danse au XXe Siècle, Bordas). Ses jeunes représentants, bientôt estampillés «auteurs» (comme il existe un cinéma d'auteur) se nomment alors Dominique Bagouet, Odile Duboc, Régine Chopinot, Joëlle Bouvier, Régis Obadia, Maguy Marin, Jean-Claude Gallotta... Et la nouvelle vague s'étend en dehors des frontières de l'Hexagone avec la Belge Anne Teresa de Keersmaeker, par exemple.
Paradis retrouvé
De cette dernière on pourra (re)découvrir les Early Works, où elle revisite avec fougue et liberté le répertoire musical classique ou contemporain, de Mozart à Bela Bartok en passant par Steve Reich. Rosas danst Rosas, son œuvre phare, fascine toujours par ses folles accélérations, ses ruptures de rythmes, sa vigueur intacte. Le «Boom» sera par ailleurs inauguré par la reprise du légendaire duo Welcome to Paradise de Joëlle Bouvier et Régis Obadia par le Ballet de Lorraine, un spectacle sans décor mais influencé par le cinéma dans sa bande-son, ses éclairages, son montage en séquences filmiques... ll se terminera par une semaine entière consacrée à un autre chorégraphe très proche du 7e art, Jean-Claude Gallotta. Le Grenoblois viendra à Lyon avec trois pièces assez différentes : la reprise de Daphnis et Chloé, emblématique de ses débuts humoristiques et "sauvages" dans les années 1980 ; sa lecture récente du Sacre du Printemps de Stravinski qui le voit rappeller son admiration inentamée pour le compositeur russe et pour le danseur Nijinski ; et son nouveau projet de «chroniques chorégraphiques» intitulé Racheter la mort des gestes. Fruit d'un atelier de travail, cette pièce réunit 27 interprètes amateurs et professionnels et s'annonce comme une très libre divagation entre actualité et intimité, souvenirs et présent, mouvement dansé et geste quotidien. Un mélange des genres dans lequel Gallotta excelle.
«Le boom des années 80»
au Toboggan et à la Maison de la Danse, du jeudi 10 janvier au dimanche 3 février