L'an passé, au Théâtre de Villefranche, Vincent Mourlon interprétait, avec une intensité si redoutable qu'on se demande encore s'il était dans le sur-mesure ou dans la composition, un médiocre laboureur dont la femme s'éveille au langage au contact d'un meunier lettré. Les 28 et 29 janvier, il y campera un peintre éclaboussé par l'effondrement du couple d'un député qui accuse, à tort et avec une violence mortelle, son épouse d'adultère. Et on est sûr que le même doute poindra. Tel est le théâtre de David Gauchard, le metteur en scène derrière ces distributions, depuis la fin de sa trilogie shakespearienne, qui le vit rajeunir des tragédies du barde d'Avon avec une malice confinant à l'insolence : si viscéral qu'il en devient plus vrai que nature.
Une conséquence de sa décision de confronter son art à des auteurs plus contemporains, hier Harrower (pour Des Couteaux dans les poules), aujourd'hui Andreïev avec le chaotique et rare Ekaterina Ivanovna, rendant à ses comédiens une place que la vidéo et la musique avaient un peu trop tendance à leur ravir. A un mélodieux bémol près, cette création étant pour lui l'occasion de retrouver le guitariste Olivier Mellano, principal artisan (avec le sus-cité Mourlon), de la réussite de son Richard III.
Benjamin Mialot